Une explication énergétique au Parkinson

Le neurone divorce de la motochondrie

Publié le 11/10/2010
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Crédit photo : BSIP

BIEN QUE des mutations de gènes ont été identifiées dans quelques formes familiales de maladie de Parkinson (MP), la cause de la forme sporadique, la plus courante, n’est pas connue. On suspecte qu’une pression génétique (significative, mais faible) s’associe à des facteurs environnementaux. Les recherches épidémiologiques ont indiqué que l’exposition à des pesticides (y compris la roténone, un insecticide issu d’une plante et utilisé en agriculture biologique) élèvent le risque.

Il existe un trait anatomo-pathologique observé dans les échantillons de tissu cérébral post-mortem de patients ayant eu une MP: les corps de Lewy. Il s’agit d’inclusions neuronales dans le locus niger, contenant de l’alpha-synucléine en motte (une protéine mutée dans les formes familiales de MP) ainsi que des mitochondries endommagées.

Dix groupes de gènes.

Clemens Scherzer (Harvard Medical School) en association avec une équipe internationale de chercheurs, montre, qu’une étiologie de la MP pourrait être liée à dix groupes de gènes impliqués dans la production d’énergie, des gènes dont l’altération « incite les neurones à divorcer de leurs mitochondries et à se désolidariser de leurs sources cellulaires d’énergie. » L’expression anormale de ces gènes est observée dès les stades initiaux de la MP, bien avant la survenue des symptômes.

Le résultat le plus intéressant de cette étude est la découverte du gène PGC1-alpha qui représente une nouvelle cible thérapeutique sur laquelle on peut intervenir précocement. Les 10 groupes de gènes sont en effet supervisés par un régulateur, le gène PGC-1alpha.

« PGC1-alpha est un déclencheur de premier ordre, qui active des centaines de gènes mitochondriaux et notamment de nombreux gènes servant au maintien de la " centrale énergétique " de la mitochondrie. »

Des travaux antérieurs avaient lié des défauts de l’activité des mitochondries à la MP, mais ils n’avaient pas débouché sur la découverte d’un groupe spécifique de gènes tels que ceux mis en évidence par Scherzer et coll.

Pour identifier de nouveaux gènes potentiellement associés à la MP, le Consortium GPEX (Global PD Gene Expression) a réalisé une méta-analyse de 17 études indépendantes de criblage du génome entier (GWS pour genome wide studies), à l’aide de puces à ADN. Ces études ont été réalisées sur 322 échantillons de tissu cérébral post-mortem du locus niger et sur 88 prélèvements sanguins. Les échantillons tissulaires provenaient de patients présymptomatiques, symptomatiques et de témoins, dénués de déficit neurologique à l’autopsie.

Des effets dévastateurs.

Les gènes contrôlant la bioénergie cellulaire sont sous-exprimés dans la MP. Ce que les auteurs confirment in vitro dans une contre-épreuve. Ainsi, sur des modèles cellulaires de la maladie, l’activation de PGC1-alpha résulte en une expression accrue de sous-unités de la chaîne respiratoire, avec un blocage de la perte des neurones dopaminergiques induite par une alpha-synucléine mutante ou par la roténone.

« Une interruption de l’alimentation énergétique de la cellule neuronale peut avoir des effets dévastateurs, quand ont sait que les cellules cérébrales consomment environ 20 % de l’énergie corporelle totale, alors que le cerveau ne fait que 2 % du poids. »

Pourquoi le cerveau qui semble si dépendant de la fourniture en énergie abandonne t-il dans cette maladie son principal appareil producteur d’énergie ? « Cette question semble être au cœur du mystère de la maladie de Parkinson. » L’activité mitochondriale pourrait être affectée par une association de gènes associée à l’environnement.

Science Translational Medicine, 6 octobre 2010.

Dr BÉATRICE VUAILLE

Source : Le Quotidien du Médecin: 8833