L' EXISTENCE d'une part héréditaire dans le déterminisme des maladies cardio-vasculaires n'est plus à démontrer.
Le rôle des facteurs de l'hémostase est, par ailleurs, bien établi. Ainsi, les concentrations de fibrinogène, de facteurs VII et VIII, de facteur de von Willebrand, de TPA et de plasminogène activateur-inhibiteur (PAI-1) ont été associées aux maladies coronariennes. Dans les gènes codant les facteurs VII et XIII, des polymorphismes de séquences ont été reconnus et associés aux concentrations des protéines de l'hémostase et au risque cardio-vasculaire.
Des jumelles monozygotes ou dizygotes
L'équipe britannique a tenté d'évaluer « l'héritabilité » des variations de concentration ou de fonction de ces différents facteurs. L'étude a été menée de façon tout à fait classique dans des couples de jumeaux - ou plutôt de jumelles, puisqu'il s'agissait, dans tous les cas, de femmes ; 149 paires de jumelles homozygotes ont été étudiées, ainsi que 352 paires de jumelles dizygotes, âgées de 18 à 79 ans. (Un autre échantillon de 89 jumelles homozygotes et de 196 jumelles dizygotes a été utilisé pour l'analyse du facteur VII.)
Les comparaisons des variabilités entre jumelles monozygotes ou dizygotes font ressortir une variabilité d'origine génétique comprise entre 41 et 75 %, en ce qui concerne les concentrations de plasminogène, de facteur VII, de facteur VIII, de PAI-1, de TPA, de facteur de von Willebrand et, enfin, des sous-unités A et B du facteur XIII. L'activité du facteur XIII montre une part de déterminisme génétique plus élevée encore : 82 %. Inversement, la sous-unité A du facteur XII serait davantage modulée par l'environnement, puisque son « héritabilité » dans les couples de jumelles homozygotes ne dépasse pas 38 %.
L'âge intervient également dans la variabilité des facteurs de l'hémostase, dans des proportions comprises entre 1,5 % pour le PAI-1 et 14,4 % pour le TPA. Enfin, ni le jeûne ni l'aspirine ne paraissent avoir d'effet sur les facteurs de l'hémostase.
Comme le souligne un éditorial du « Lancet » (Stephen B. Harrap et John L. Hopper, université de Melbourne), l'étude britannique comporte le même risque de biais que toutes les études de jumeaux : les jumeaux homozygotes partagent a priori plus de facteurs environnementaux que les jumeaux dizygotes, ne serait-ce que durant la vie intra-utérine. La part attribuée à l'hérédité peut donc être surévaluée. Si surévaluation il y a, elle doit cependant rester modeste. Les résultats publiés paraissent, en effet, tout à fait compatibles avec les données déjà obtenues sur le déterminisme des facteurs de l'hémostase. L'étude n'est en somme qu'une confirmation.
Reste maintenant à comprendre les bases moléculaires de la variabilité génétiquement transmise.
Des polymorphismes de gènes déjà identifiés
Pour certains facteurs, des polymorphismes des gènes ont déjà été identifiés et associés à la variance. C'est, par exemple, le cas du facteur VII, dont les polymorphismes expliquent environ 40 % de la variance, soit un ordre de grandeur compatible avec les 63 % de variabilité d'origine génétique obtenus par les Britanniques. Pour le fibrinogène, en revanche, le problème du support de la variabilité génétiquement transmise est posé. Les 44 % obtenus par les Britanniques sont cohérents avec les chiffres de 51 %, ou de 20 à 48 %, obtenus dans d'autres études. Mais, dans les trois chaînes constituant le fibrinogène et les trois gènes correspondants, on ne connaît de polymorphismes que sur la chaîne bêta et ces polymorphismes ne paraissent pouvoir être associés qu'à 5 % environ de la variabilité de la concentration. Cette fois, on change d'ordre de grandeur. Il faut donc envisager des régulations génétiquement déterminées du taux de fibrinogène. Mais elles restent à identifier. Le même type de problème se pose pour le PAI-1, le facteur VIII, ou le facteur de von Willebrand.
M. de Lange et coll., « Lancet » du 13 janvier 2001 ; 357 : 101-105.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature