Un article de la loi HPST sur les assurances sème le trouble

Les gynéco-obstétriciens décidés à cesser les accouchements

Publié le 10/06/2009
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Crédit photo : S. Toubon/« le Quotidien »

DÉJÀ INQUIETS de la hausse des primes d’assurance qui se profile pour l’année 2010, les gynécologues-obstétriciens, notamment ceux qui exercent en secteur II, ont été fortement secoués par le vote des sénateurs qui, dans le cadre de la loi Bachelot, ont suivi le gouvernement qui veut réserver aux seuls praticiens du secteur I la prise en charge par l’État et l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) des indemnités supérieures à trois millions d’euros.

« C’est une véritable agression contre la profession  » n’hésite pas à accuser le Dr Marc-Alain Rozan, président du Syndicat national des gynécologues obstétriciens de France (SYNGOF), qui appelle l’ensemble de la profession à combattre cet article 18 quater B de la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST). Et ce responsable syndical de demander d’ores et déjà aux quatorze députés et sénateurs de la commission mixte paritaire, qui siégeront le 16 juin pour écrire la version définitive de la loi, de rayer cet article. Le Dr Jean-Francois Rey, président de l’Union Nationale des Médecins Spécialistes (UMESPE-CSMF), est intervenu, dit-il, pour convaincre les parlementaires de « l’ineptie d’une telle disposition. Certains en sont convaincus, mais rien n’est acquis ».

Une promotion pour le secteur I ?

D’autant, semble-t-il, que le gouvernement et la ministre de la Santé ne semblent pas décidés à céder. Roselyne Bachelot, lors du débat au Sénat, pour défendre son amendement, avait pris argument du fait que les médecins du secteur II pouvaient toujours pratiquer des dépassements pour compenser la hausse éventuelle des primes de l’assurance qu’ils devront contracter pour se couvrir au-delà de 3 millions d’euros. Pour la ministre, les professionnels de santé de secteur I ne peuvent compenser la hausse des primes par des dépassements. Des arguments qui font bondir le Dr Rozan. « Pour une assurance de trois millions d’euros, nous payons, y compris l’aide de l’État, une prime d'environ 40 000 euros par an. Or, chaque accouchement nous est rémunéré 360 euros. Avec une moyenne nationale de 100 à 120 accouchements par an, nous avons déjà beaucoup de mal à nous en sortir. Au-delà d’une couverture de 3 millions d’euros, les primes sont très élevées et même prohibitives et impossibles à payer pour le médecin. »

Conclusion de cette situation : les gynécologues-obstétriciens vont cesser de faire des accouchements à partir de juillet. Une décision que le Dr Rozan a déjà prise depuis plusieurs mois . «  Il est impossible de vivre avec cette crainte permanente de pénalités qui peuvent atteindre quatre, cinq, voire six millions d’euros. C’est une menace pour notre vie, notre famille, notre descendance  », dit-il.

«  Nous soutenons et encourageons les gynécos dans leur action  », affirme encore le Dr Rozan.

Même détermination du Dr Rey, qui insiste sur le fait que l’ensemble des spécialistes et notamment ceux qui sont en première ligne comme les chirurgiens et les anesthésistes, pourront à leur tour subir demain les conséquences de cette disposition législative, si elle est confirmée mardi prochain par la CMP.

Reste que pour la ministre de la Santé qui a défendu avec vigueur son amendement, cette limitation aux seuls médecins du secteur I de la prise en charge des indemnités supérieures à 3 millions d’euros est un moyen évident de promouvoir ce secteur d’exercice. Pour le Dr Jean François Rey, «  encourager, par cette mesure, les spécialistes du secteur II à pratiquer des dépassements pour payer leurs primes d’assurance est un non-sens et est en tout cas contraire aux dernières déclarations du président de la République  ». En faisant adopter cet amendement, le gouvernement n’a pas cherché, dit-il, «  comme il voulait le laisser croire, à calmer le jeu avec les médecins. Bien au contraire, il a choisi l’affrontement  ».

 JACQUES DEGAIN

Source : lequotidiendumedecin.fr