Maladie de Parkinson

Les neurologues libéraux veulent rester acteurs à part entière

Publié le 09/06/2011
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C’EST À l’occasion de la Journée mondiale sur la maladie de Parkinson, mi-avril, que l’association France Parkinson a réclamé aux pouvoirs publics la mise en place d’un grand plan de lutte contre la maladie. L’association a notamment demandé la création de quinze centres de référence destinés à jouer un rôle d’information et de coordination.

Cette proposition fait réagir le Dr Alain Jager, secrétaire général du Syndicat national des neurologues et vice-président de l’Association des neurologues libéraux de langue française. « Cette initiative repose sur la même logique que celle qui a prévalu lors de la mise en place de plusieurs plans de santé publique, notamment dans le domaine de la maladie d’Alzheimer ou des AVC. À chaque fois, on a privilégié des filières de soins assez hiérarchisées dans lesquelles les neurologues, en particulier ceux de ville, ont eu du mal à être situés et à se situer », indique le Dr Jager, en avouant avoir du mal à comprendre cette démarche de la part de France Parkinson. « C’est un peu étonnant : en effet, on entend régulièrement les associations de patients dénoncer une certaine forme de paternalisme de la part des médecins, indique-t-il. Et de façon un peu curieuse, elles se réfugient pourtant volontiers dans ce paternalisme vis-à-vis des CHU », poursuit le Dr Jager, en rappelant que sur les 150 000 personnes touchées par une maladie de Parkinson en France, environ 80 % sont suivies en ambulatoire.

Aujourd’hui, la neurologie a une solide expérience en matière de réseaux de soins. « Dans la sclérose en plaques, par exemple, les réseaux performants ne sont pas « hospitalo-centrés ». Certes, il y a toujours un leader référent qui est le CHU, mais celui-ci veille à ce que le neurologue traitant, en ville ou en centre hospitalier général (CHG), reste le neurologue référent pour le patient. Mais quand on met en place une structure pyramidale hiérarchique, les choses sont un peu différentes. On a déjà eu cette expérience avec la sclérose latérale amyotrophique. Certains neurologues pensent que cette maladie ne peut se structurer que par filières. Le résultat est que le neurologue de ville perd très vite contact avec le patient qui est suivi dans un centre de référence », souligne le Dr Jager.

On peut comprendre que la référence chirurgicale reste hospitalière.

Dans la prise en charge d’une maladie de Parkinson, comme pour celle de l’épilepsie, le CHU restera la référence pour le traitement chirurgical. « Quand se pose la question de savoir si le patient est candidat à une procédure préchirurgicale, le neurologue libéral va l’adresser à ses correspondants habituels au CHU qui vont la mettre en place. C’est quelque chose qui se fait de manière tout à fait naturelle et on peut comprendre que cette référence chirurgicale reste hospitalière. Mais il s’agit d’une pathologie pour laquelle on a beaucoup moins besoin d’une référence en matière de traitement médical. La maladie de Parkinson est l’archétype de la maladie neurologique très courante que connaissent tous les neurologues de ville ou exerçant en CHG. Et il serait bon qu’on conserve leur place dans la prise en charge de cette pathologie », estime le Dr Jager.

Selon lui, cette démarche des associations de patients accentue le mouvement déjà engagé par le vote de la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST). « Cette loi est très hospitalo-centrée. Et on a le sentiment qu’il y a aujourd’hui des neurologues avec une majuscule, qui sont les hospitaliers, et des neurologues avec une minuscule, qui sont les libéraux censés faire de la « bobologie » neurologique. La neurologie est train de se ségréger, d’une part, autour de pathologies dites transversales (douleur, maladies de la mémoire, AVC, sommeil…) dans lesquelles le neurologue est une pièce d’un ensemble et, d’autre part, des pathologies plus proprement neurologiques (sclérose en plaques, SLA, épilepsie…), qui s’orientent vers un hospitalo-centrisme, comme en témoigne le retour des réserves de prescription hospitalière de nouveaux traitements ambulatoires », constate le Dr Jager.

Selon lui, un des objectifs de cette organisation sanitaire est aussi de favoriser au maximum la constitution de pools de patients éligibles à des protocoles. « Dès qu’une nouvelle structuration des soins se met en place, les CHU nous expliquent qu’il faut leur envoyer des patients éligibles à des protocoles thérapeutiques. Nous connaissons l’importance de ces essais, mais ces aspects méritent réflexion », précise le Dr Jager.

D’après un entretien avec le Dr Alain Jager, secrétaire général du Syndicat national des neurologues et vice-président de l’Association des neurologues de langue française.


Source : Bilan spécialistes