Filière de soins visuels, délégation de tâches

Les orthoptistes se voient incontournables

Publié le 31/01/2012
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Crédit photo : PHANIE

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LA PÉTITION contre la création du statut de technicien d’aide en soins ophtalmologiques (TASO), un projet lancé l’automne dernier par le syndicat national des ophtalmologistes de France (SNOF), a déjà recueilli en trois mois plus de 2000 signatures auprès des orthoptistes (mais aussi de patients). Cette mobilisation de la profession (qui compte 3 200 personnes, dont les trois quarts sont libéraux) traduit son refus « de se laisser manger des compétences par des non-médicaux et non-para-médicaux », analyse Laurent Milstayn, président du syndicat national autonome des orthoptistes (SNAO). « De très larges pans de nos décrets de compétences sont repris dans le certificat de qualification professionnelle de ce statut ouvert aux secrétaires, aides-soignants et infirmiers. C’est inadmissible ! », développe-t-il. Depuis, le SNOF a fait amende honorable et réaffirmé sa volonté de travailler avec les orthoptistes. Un message que ces derniers défendent becs et ongles.

Gain de temps et de chiffre d’affaires.

Pour les orthoptistes, la délégation de tâches au sein des cabinets d’ophtalmologie est la voie d’avenir.

Les orthoptistes font valoir qu’ils sont les seuls professionnels paramédicaux de la filière de soins visuels dont les compétences recouvrent l’ensemble des pathologies oculaires.

Alexis Lavergne-Calcinelli travaille depuis trois ans dans une structure regroupant 4 ophtalmologistes et 2 orthoptistes salariés à Saint-Malo. Après 10 ans de salariat dans une clinique, il se félicite des responsabilités qui lui incombent désormais. « Je prends en charge le patient à son arrivée au cabinet et effectue une consultation classique, à l’exception du fond d’œil et du dépistage des pathologies, ainsi que certains examens complémentaires ». Résultat de ce travail en binôme, un gain de temps pour l’ophtalmologiste, qui peut voir six ou sept patients à l’heure (et non quatre), des délais de rendez-vous limités à deux mois (contre 9 à 12 dans la région malouine), la gestion plus sereine des urgences et des premières visites, et un chiffre d’affaires augmenté de 30 %, sans hausse du prix de la consultation.

Nomenclature obsolète.

Dans bien des secteurs déjà, la coopération ophtalmologiste/orthoptiste aide à combattre les déserts médicaux. À Vichy, un ophtalmologiste - d’après un protocole acté par la Haute Autorité de santé - confie une mallette portable à un orthoptiste qui se déplace, effectue sa consultation, et lui transmet, via la télémédecine, les résultats : le médecin décide alors de la nécessité ou non à voir le patient.

« Les jeunes orthoptistes dont les compétences sont très étendues veulent pouvoir travailler en libéral auprès des ophtalmologistes, qui ont étudié avec eux, il faut leur permettre d’accéder à l’installation et de faire le même travail qu’un salarié », avance Benoît Rousseau, orthoptiste salarié dans un hôpital parisien.

Le mouvement est en marche. « On assiste à une montée des professionnels qui se regroupent en libéral, même s’ils ne sont qu’une centaine aujourd’hui contre 700 salariés », confie Laurent Milstayn, qui attend beaucoup des négociations avec l’Union nationale des caisses d’assurance-maladie (UNCAM).

« Tous les actes cités dans notre décret de compétences doivent bénéficier d’une nomenclature », explique-t-il. Les orthoptistes souhaitent étendre leurs responsabilités (à la surveillance des diabétiques, des glaucomateux équilibrés, au renouvellement des verres correcteurs...) ou être autorisés à exercer sans la présence obligatoire d’un ophtalmologiste.

Parallèlement, ils veulent croire que la refonte de leur formation permettra d’atteindre des promotions de 100 étudiants dans les 15 écoles d’orthoptistes (une trentaine aujourd’hui), afin de répondre aux missions qui pourront leur être confiées. Les ophtalmologistes ont déjà estimé à 4 000 le nombre d’orthoptistes supplémentaires dont ils auraient besoin au sein de leurs cabinets.

 COLINE GARRÉ

Source : Le Quotidien du Médecin: 9075