L’incidence du cancer augmente avec l’âge. Environ un tiers des cancers sont aujourd’hui diagnostiqués après l’âge de 75 ans, mais la population vieillit et la proportion de cancers du sujet âgé devrait atteindre 50% en 2050.
« L’âge a longtemps été un élément majeur de décision. Les sujets âgés recevaient des traitements moins agressifs (ou n’étaient pas traités) sur ce seul facteur. Les essais cliniques de médicaments innovants ne permettaient pas l’inclusion des patients au-delà de 75 ans. Peu à peu, cela change », indique le Dr Boussion. Dans les derniers essais d’immunothérapie, environ 10% des sujets inclus ont plus de 75 ans, mais ils restent sous-représentés par rapport à leur proportion en vraie vie.
Le contexte thérapeutique
En situation adjuvante, le traitement vise à diminuer le risque de rechute après l’exérèse du cancer. Chez les patients âgés, son indication doit mettre en balance le risque de rechute (défini par les caractéristiques de la tumeur) et l’espérance de vie. Il est cependant important d’avoir en tête qu’aujourd’hui, à 85 ans, l’espérance de vie moyenne de la femme est de 7 ans, et celle de l’homme de 5 ans. Sauf comorbidités exposant à un décès plus précoce, envisager un traitement adjuvant parait donc raisonnable pour une partie de cette population, même s’il dure plusieurs mois.
En situation métastatique, la chimiothérapie ne permet pas de guérir la maladie. L’espérance de vie est dans la majorité des cas corrélée à l’évolution du cancer. « Dans cette situation, la notion de qualité de vie est souvent plus importante pour les patients que le gain en survie que l’on peut attendre des traitements. Mais la chimiothérapie malgré des effets secondaires, peut permettre un contrôle des symptômes générés par la maladie, et donc améliorer la qualité de vie » explique le Dr Boussion.
Évaluer les fragilités
L’âge ne préjuge pas de la capacité d’un patient à supporter un traitement mais l’index thérapeutique est plus étroit chez les patients âgés. Une nouvelle spécialité, l’oncogériatrie, est apparue pour évaluer le vieillissement global du patient, différencier l’âge physiologique de l’âge chronologique et proposer un plan de traitement en fonction des fragilités mises en lumière,
Des tests de dépistage ont été développés afin de permettre à chaque praticien d’identifier les patients âgés à adresser pour une évaluation gériatrique approfondie. Le questionnaire G8[i], réalisable en moins de 5 minutes, comprend 8 items cotés sur 17 points : nombre de médicaments par jour, état nutritionnel, perte de poids, motricité, troubles neuropsychiatriques, auto-évaluation de la forme, indice de masse corporelle et âge.
Si le score du G8 est inférieur à 14/17, une évaluation gériatrique approfondie doit être proposée avant de débuter les traitements. Elle explore différents paramètres médicaux (comorbidités, interactions médicamenteuses, troubles cognitifs) mais aussi sociaux (organisation de vie, autonomie, entourage), psychiques et nutritionnels. Elle est souvent réalisée par des gériatres formés à l’oncologie mais peut associer d’autres professionnels (diététicien, assistante sociale…) « A l’issue de cette évaluation, soit le patient peut être traité comme un sujet plus jeune (en veillant à d’éventuelles fragilités mises en lumière : suivi nutritionnel, médicaments à arrêter…), soit ses fragilités imposent d’adapter le projet de soins », précise le Dr Boussion.
En revanche, si le score est égal ou supérieur à 14, le patient peut être traité comme un patient plus jeune, il n’y a pas de raison particulière d’adapter le traitement.
Soubeyran P. et al, Plos-One 2014:9(12):e115060
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