L’invitation au voyage au bout de l’enfer de Médecins sans Frontières

Des personnes entassées dans un canot pneumatique, les cris des enfants effrayés par la mer qui tangue, des détritus jonchant le sol et les détails d’une vie de misère dans un camp de réfugiés. C’est cet univers de douleur où l’avenir se résume à un énorme point d’interrogation que Médecins sans Frontières (MSF) veut faire toucher du doigt aux Italiens.

L’idée est de parachuter les personnes dans un espace de réalité virtuelle recréant l’expérience des migrants qui veulent s’installer sur le Vieux Continent et leur parcours avant et après leur départ, par exemple des côtes libyennes. « Nous avons relié deux tentes gonflables, le modèle que nous utilisons dans les camps de réfugiés pour recréer les conditions de vie des migrants », explique Norina Liccardo opératrice humanitaire de MSF. Ce projet intitulé « #Milionidipassi Experience », l’expérience de millions de pas, est organisée sur le modèle des tournées car les deux tentes seront installées jusqu’en décembre prochain dans plusieurs villes italiennes. Et notamment dans les cités qui hébergent des festivals du cinéma afin de sensibiliser les adolescents. « Nous irons fin juin à Giffoni, dans le sud de l’Italie où se tient un festival des enfants. Mobiliser, sensibiliser les jeunes est essentiel car ils doivent apprendre très vite, le concept de tolérance et celui de l’accueil », analyse Norina Liccardo.

Casque audio et réalité virtuelle

Les visiteurs endossent un casque audio et un masque de réalité virtuelle comme dans les vieux films de science-fiction, et le voyage au bout de l’enfer commence. D’abord, les préparatifs, puis le départ, le voyage et l’arrivée en Europe via l’Italie.

Entre le départ et l’arrivée, les visiteurs pourront voir les conditions dramatiques dans lesquelles se déroule l’interminable traversée. « En trois jours, quelque cinq cents personnes ont visité notre structure. Je les ai vus ressortir bouleversées. Il y avait dans leurs yeux, un tout autre regard, empreint d’une forte émotion », confie Norina Liccardo qui a accompagné les visiteurs à Rome. Pour Loris De Filippi, président de la branche italienne de Médecins sans Frontières, cette expérience est unique et essentielle car elle permet d’éduquer les Européens.

« Chaque jour, nous voyons les images de ces personnes désespérées entassées sur des petits bateaux à la télévision. Le public risque de s’habituer à ces images », estime Loris De Filippi. Il ajoute qu’en revanche, « organiser une sorte de plongée dans le monde de la douleur, de ceux qui ont leurs maisons détruites par des bombes ou qui ont tout simplement risqué leur vie en traversant la mer pour offrir un avenir à leurs enfants, est une autre chose ». En octobre prochain, la campagne #Milionidipassi Experience, fera étape au festival de la Science à Gênes. Et d’ici à la fin de l’année, à Milan. Après, cette campagne selon les organisateurs, pourrait toucher d’autres pays européens.