CONGRES HEBDO
La reconnaissance d'une pathologie au titre de maladie professionnelle repose sur des critères stricts mentionnés dans les « tableaux » publiés au « Journal officiel ».
Une fois le caractère professionnel de l'affection reconnu, la réparation des séquelles ouvre le droit à une incapacité permanente totale (IPT) ou partielle (IPP) dont le taux est calculé par le médecin-conseil en fonction d'un barême indicatif.
En ce qui concerne les handicaps respiratoires, les indemnisations sont toujours difficiles à préciser car, non seulement les barèmes sont anciens et non réactualisés, mais les maladies professionnelles sont sous-déclarées : ainsi les malades ne bénéficient pas des « avantages » inscrits en filigrane dans les textes de loi.
Un groupe de travail réunissant des membres de la Société française de pneumologie de langue française et de la Société française de médecine du travail a été créé pour tenter d'apporter des solutions aux problèmes non résolus.
Certaines maladies professionnelles sont responsables de handicaps qui ne peuvent être évalués que lors de l'exposition au risque. L'asthme aux isocyanates en est un exemple : le sujet n'a des crises d'asthme que lorsqu'il est en contact avec les isocyanates. Après éviction, les épreuves fonctionnelles respiratoires, sont normales. En toute logique, un expert ne peut donner un taux d'IPP supérieur à 10 % pour un patient dont les épreuves fonctionnelles se sont normalisées et dont le handicap a cessé au moment de l'examen. « On se trouve alors face à une problématique de réparation qui nuit au patient car le patient doit quitter son emploi », poursuit le Dr Grignet.
Evaluer le handicap
Ce type de pathologie pose d'autres questions : quels moyens utiliser pour évaluer le handicap et calculer en toute impartialité le taux
d'IPP ? Une épreuve fonctionnelle respiratoire seule est-elle suffisante pour évaluer objectivement un asthme à l'effort ? Ne faut-il pas introduire d'emblée une épreuve d'effort systématique et un test de marche dans toutes les expertises qui vont amener à indemniser une dyspnée d'effort ?
Dans le cadre des pneumoconioses, la Communauté européenne du charbon et de l'acier et l'OMS avaient établi une classification fondée uniquement sur des images radiologiques de telle sorte que, de 1947 à 1980, les mineurs de charbon et de fer ont été indemnisés sur des images radiologiques. Or certaines images radiologiques impressionnantes, comme des masses pseudo-tumorales bilatérales, n'induisent pas un handicap majeur alors que des images radiologiques minimes telles que de fines réticulations ou des fibroses s'accompagnent de handicap important ; elles viennent d'être reconnues comme des maladies professionnelles.
Lorsque la notion de handicap fonctionnel a été introduit « il a fallu rattraper, de 1980 à 2000, certaines inégalités et informer les médecins du travail et les pneumologues, que les patients ne comprenaient plus que le taux d'IPP ne soit plus corrélé au diagnostic radiologique », explique le Dr Grignet.
L'asbestose présente deux paradoxes.
Le premier : la découverte radiologique de plaques pleurales confirme le diagnostic de pathologie respiratoire liée à l'amiante. Toutefois, les plaques pleurales peuvent ne pas s'exprimer cliniquement : dans ce cas, le caractère professionnel de la maladie était reconnu mais en l'absence de retentissement clinique n'ouvrait pas le droit à une réparation.
Cette situation a évolué : « On a pris la décision d'allouer un taux d'IPP de 5 % dès qu'il y a des plaques pleurales même sans déficit fonctionnel », explique le Dr Grignet.
Attention à la néovascularisation
Le second: les plaques pleurales sont acellulaires et ne peuvent pas dégénérer en mésothéliome. En revanche, à proximité des plaques pleurales, se forme une néovascularisation plus importante qui peut être le siège d'un mésothéliome. « Contrairement à une idée très répandue, les patients qui ont des plaques pleurales peuvent avoir à proximité un mésothéliome », explique le Dr Grignet. Une surveillance régulière est donc indispensable, la présence de plaques pleurales signifie qu'il y a des fibres d'amiante donc le risque carcinologique est indéniable.
D'autres exemples pourraient confirmer la difficulté d'établir des liens entre une pathologie respiratoire et l'exposition à un risque professionnel.
L'interrogatoire, étape préliminaire, oriente le diagnostic clinique et cherche à établir une relation de cause à effet entre l'affection et l'environnement professionnel en reconstituant l'histoire professionnelle du patient et la description des postes de travail.
Il doit comporter un questionnaire spécifique standardisé et validé qui permet de mettre en évidence les symptômes en liaison avec l'exposition professionnelle.
En conclusion, il est important de savoir que la prise en charge du handicap respiratoire, quand il est d'origine professionnel, est une priorité pour le pneumologue afin d'aider son patient au mieux tant sur le plan médical que médico-social et parfois même médico-légal.
Entretien avec le Dr Jean-Pierre Grignet (Denain)
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