MANITUDE dans la dépression bipolaire

Moins de virages de l’humeur avec la tianeptine

Publié le 21/03/2010
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LA DÉPRESSION BIPOLAIRE, dont la prévalence est particulièrement élevée dans les troubles bipolaires de type 2, est marquée par la fréquence des rechutes dépressives et des symptômes résiduels, un risque suicidaire majeur, le risque de développement de comorbidités (troubles du comportement alimentaire, abus d’alcool ou de toxiques, troubles anxieux…) et un retentissement social, professionnel et familial particulièrement important. Le traitement des épisodes dépressifs et des symptômes dépressifs résiduels constitue donc un enjeu pronostic majeur.

Les recommandations de prise en charge du trouble bipolaire ont considérablement évolué depuis dix ans. « Cependant, à l’heure actuelle, ces recommandations n’ont pu converger vers un optimum entre, d’une part, la nécessité de répondre à l’enjeu immédiat, la symptomatologie dépressive, et, d’autre part, les risques de virages de l’humeur ou d’accélération de la maladie sous anti-dépresseur », souligne le Dr Raphael Gaillard (Research associate, Brain Mapping Unit, Cambridge University, Grande-Bretagne).

L’étude MANITUDE menée auprès d’un large panel de psychiatres amenés à prendre en charge des patients bipolaires présentant un épisode dépressif, a permis d’explorer la survenue des virages de l’humeur, les facteurs de risque prédisposant à ces virages et les effets d’ anti-dépresseurs aux mécanismes d’action différents.

Neuf cents psychiatres.

Neuf cents psychiatres ont participé à l’étude. Ils ont inclus 975 patients bipolaires âgés de 18 à 65 ans sous thymorégulateurs depuis au moins trois mois, indemnes de pathologie organique déséquilibrée, ne faisant d’abus ni d’alcool ni de toxiques, n’ayant pas eu de traitement par électrochoc récent. Ces patients ont été traités au choix du psychiatre soit par tianeptine, soit par IRS soit par IRSNa + tricycliques, et ont été suivis pendant six mois.

Ces patients, en majorité des femmes (60 %), âgés en moyenne de 45 ans dont la maladie durait au moins depuis seize ans, avec plusieurs épisodes de virages de l’humeur, avaient, à l’entrée dans l’étude, un score moyen MADRS de 33,90.

Au cours des six mois de suivi, 196 patients (20 %) ont fait un virage de l’humeur. Le nombre de virages antérieurs, la durée de l’épisode dépressif actuel, l’exposition multiple aux antidépresseurs, sont apparus comme les principaux facteurs prédictifs de virage de l’humeur.

Au terme des six mois, les patients traités par la tianeptine, bien qu’ayant un nombre d`épisodes antérieurs plus élevé (7,26 vs 5,27 dans le groupe IRS et 6,82 dans le groupe IRSNa + tricycliques) ont fait moins de virages de l’humeur que les patients des deux autres groupes de traitement (16,70 vs 33,30 et 25,90).

En revanche aucune différence en terme d’efficacité antidépressive n’a été observée entre les différents traitements comme le montre la réduction du score MADRS à six mois comparé au score initial (score MADRS total de 8,39 vs 34,01).

Cette étude souligne l’intérêt de la tianeptine dans la prise en charge de la dépression bipolaire et permet de faire le lien avec les travaux récents sur l’implication de la voie glutaminergique dans la neuroplasticité, conclut le Dr Raphael Gaillard.

8e Congrès de l’Encéphale. Symposium organisé par les Laboratoires Ardix, présidé par le Pr Jean-Michel Azorin (Marseille).

 Dr Micheline FOURCADE

Source : Le Quotidien du Médecin: 8719