Hypertension

Objectif tensionnel, le mieux est l’ennemi du bien

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Publié le 17/06/2016
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Réunis à l’occasion du récent Congrès européen d’hypertension, les hypertensiologues du Vieux Continent sont revenus sur la question de l’objectif tensionnel optimal. Avec plusieurs arguments en faveur d’une attitude mesurée
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Crédit photo : GARO/PHANIE

En septembre 2015, l’étude SPRINT a ébranlé les convictions des spécialistes de l’hypertension en les questionnant sur les objectifs à atteindre. Dans ce travail, une attitude plus agressive pour atteindre 120 mmHg de pression artérielle systolique (PAS) permettait de gagner 25 % en protection CV comparativement à l’attitude « classique » visant les 140 mm Hg chez des patients dont le risque CV est de 15 % à 10 ans. Mais rien ne sert de sprinter car ce bénéfice s’effectue au prix d’une augmentation des effets indésirables.

C’est sur ce point que les auteurs d’une méta-analyse présentée lors du congrès, se sont demandé si « le mieux n’est pas l’ennemi du bien ». Ils ont réuni 50 essais cliniques et ont regardé précisément le bénéfice CV en le mettant en parallèle avec les arrêts pour effets indésirables médicamenteux. « Le risque CV diminuait de 24 % mais celui d’arrêt de traitement augmentait de 89 % », a souligné le Pr Alberto Zanchetti (Milan), co-signataire de ce travail. Soit 33 événements CV majeurs évités mais 84 arrêts supplémentaires pour 1 000 patients traités pendant 5 ans selon cet article publié en ligne le 24 mai 2016. En faisant des analyses statistiques (métarégression), ils ont vu qu’« une réduction standard de la PAS était associée à une réduction constante du risque CV » alors qu’ils constataient dans le même temps « une réduction plus faible des événements CV et un excès plus important d’arrêts de traitement quand la PAS atteinte était en dessous de 130 mm Hg ».

La PAS à 140 mmHg reste d'actualité
Il faut donc être prudent car il est possible de tout perdre en voulant être trop strict et finalement le seuil de 140 mmHg de PAS reste d’actualité. « Si l’observance n’est pas bonne en raison d’effets indésirables, c’est tout le bénéfice du traitement qui disparaît », a souligné le Pr Zanchetti. Il a reconnu que les effets indésirables des médicaments ne sont pas toujours bien rapportés dans les essais car considérés comme « triviaux » par rapport au bénéfice CV alors que le problème des arrêts de traitement est courant en médecine générale. D’où l’importance avant d’intensifier le traitement de bien évaluer le risque CV individuel, la personnalité du patient, la fréquence des suivis et la disponibilité du médecin en cas de survenue d’effet indésirable.

Dr Muriel Gevrey

Source : lequotidiendumedecin.fr