Maladies inflammatoires chroniques intestinales

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Publié le 01/10/2015
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De nouvelles molécules  et des progrès dans les stratégies thérapeutiques

De nouvelles molécules et des progrès dans les stratégies thérapeutiques
Crédit photo : PHANIE

Les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI) sont des affections inflammatoires chroniques et progressives du tube digestif, regroupées en deux entités principales, la maladie de Crohn (MC) et la rectocolite hémorragique (RCH), dont l’évolution aboutit à terme à une destruction tissulaire irréversible (1).

Le traitement des MICI a longtemps reposé sur des traitements dits conventionnels comme les dérivés salicylés, les corticoïdes et les immunosuppresseurs. Ces traitements permettent un contrôle symptomatique de l’affection mais n’ont aucun effet sur le cours évolutif de la maladie et ne permettent pas de cicatriser la muqueuse intestinale. L’avènement des anticorps monoclonaux anti-TNF (tumor necrotizing factor-α) comme l’infliximab, l’adalimumab et le golimumab a bouleversé la prise en charge des patients souffrant de MICI en influant sur le cours évolutif de la maladie (réduction du taux de résection chirurgicale et réduction des hospitalisations) mais a également permis d’atteindre des objectifs beaucoup plus ambitieux (1,2). Ce regain d’ambition en termes d’objectif thérapeutique et la survenue de perte de réponse aux anti-TNF (10 à 20 % par an) rendent néanmoins nécessaire une course à l’optimisation du traitement des MICI.

Molécules anti-adhésions

Ainsi, 2015 aura vu la mise sur le marché du premier biosimilaire de l’infliximab pour le traitement des MICI mais également d’autres affections inflammatoires chroniques extradigestives (CT-P13, Inflectra et Remsima). Il est à noter qu’un biosimilaire, à la différence d’un médicament générique, n’est pas la copie exacte du médicament princeps mais peut différer notamment du fait d’évolution des méthodes de production (4). Des études de pharmacovigilance seront donc nécessaires pour s’assurer qu’il n’y aucun risque à interchanger les biosimilaires entre eux au cours du temps (5). L’année 2015 aura également vu la mise sur le marché de la première biothérapie non anti-TNF : le vedolizumab (Entyvio) ; premier représentant de la famille des molécules anti-adhésion, pour le traitement de la RCH et de la MC, modérée à sévère. Deux autres biothérapies non anti-TNF pourraient intégrer prochainement l’arsenal thérapeutique dans la maladie de Crohn : l’ustekinumab anticorps monoclonal anti-IL12/IL23 et le Mongersen, un oligonucléotide antisens anti-Smad7 (6).

Initialement négligée, l’optimisation des stratégies d’utilisation des anti-TNF progresse également. Intuitivement, on peut penser que la disparition de toutes lésions inflammatoires endoscopiques sera accompagnée d’une rémission plus profonde et plus durable. Cette intuition concernant la cicatrisation muqueuse a été ainsi confirmée dans plusieurs études de cohorte et dans de nombreuses analyses posthoc d’essais cliniques. Néanmoins, il n’est pas encore certain qu’il faille optimiser les traitements pour l’atteindre alors que la rémission est déjà acquise. Le dosage sérique des anti-TNF et de leur anticorps a également démontré une utilité dans les MICI (7). Ainsi, des taux résiduels plus élevés et l’absence d’anticorps dirigés contre l’anti-TNF sont des facteurs de bon pronostic quant au maintien de l’efficacité du traitement. Ces dosages n’étant pas remboursés, leur place est réservée pour l’instant aux pertes de réponse à un anti-TNF (8).

Combothéraphie

Enfin, l’utilisation de plus en plus systématique des associations thérapeutiques ou combothérapie, a permis d’optimiser l’efficacité des traitements sans pour l’instant montrer de signal d’alarme en termes de tolérance. Une vaste étude européenne devant inclure 20 000 patients dans 16 pays européens, IBD CAncer and seRious infections in Europe (I-CARE), est d’ailleurs sur le point de commencer pour répondre à la question de la tolérance de ces traitements en population.

Les années à venir devraient être le témoin de nouveaux changements, probablement profonds dans la prise en charge des MICI intégrant ces nouvelles stratégies thérapeutiques et ces nouvelles molécules.

Groupe hospitalier Henri Mondor-Albert Chennevier, université Paris-Est Créteil-Val-de-Marne, Créteil

(1) Feagan BG et al. Gastroenterology. 2008;135(5):1493-9

(2) Rutgeerts P et al. N Engl J Med. 2005;353(23):2462-76

(3) Billioud V et al. Am J Gastroenterol. 2011;106(4):674-84

(4) Weise M et al. Blood. 2012;120(26):5111-7

(5) Crommelin DJ et al. J Pharm. 2003;266(1-2):3-16

(6) Monteleone G et al J Clin Invest. 2001;108(4):601-9

(7) Ben-Horin S et al. Aliment Pharmacol Ther. 2011;33(9):987-95

(8) Afif W et al. Am J Gastroenterol. 2010;105(5):1133-9

Dr Aurélien Amiot

Source : Bilan spécialiste