Sollicité comme il ne l’avait jamais été, à ce jour, par l’adversité, le président a déployé ses ailes, en se lançant dans un marathon diplomatique, en réunissant les deux chambres en Congrès à Versailles, en faisant voter l’état d’urgence, en maintenant la réunion mondiale sur l’environnement et les dates des élections régionales. Il ne pouvait accumuler autant d’actes, de discours et de décisions sans s’attirer quelques critiques, la plupart portant sur l’état d’urgence, considéré par des juristes et des puristes comme un abus de droit. On a reproché au gouvernement de s’en servir pour interdire des manifestations « bon enfant » en faveur de l’environnement à l’occasion de la COP21. Mais toute la France a pu voir à quelle extrême violence des manifestants, souvent des casseurs, pouvaient se livrer, justifiant par leur comportement la répression de la police et les très nombreuses interpellations qui ont suivi. La liberté n’a de sens que par l’usage qui en est fait. S’il s’agit de bafouer les témoignages d’émotion populaire après les attentats, comme ce fut le cas place de la République où des bougies, des bouquets et divers objets déposés à la mémoire des victimes ont servi de projectiles contre la police, il est sûrement nécessaire que l’ordre soit rétabli.
Il y a toujours un risque à proclamer l’état d’urgence dans une démocratie. C’est l’éternel dilemme entre sécurité et liberté. Si la mesure a été votée à la quasi unanimité des députés, c’est parce qu’il aurait été imprudent de ne pas le faire, quoi qu’en disent nos meilleurs juristes. L’air n’est pas plus lourd depuis l’état d’urgence et qui veut bien jeter un coup d’oeil à la silhouette du président verra que jamais cet homme si débonnaire ne sera une menace pour nos libertés essentielles. Oui, dîtes-vous, mais après lui, que se passera-t-il ? Encore faut-il qu’il le maintienne indéfiniment, ce qui n’est pas certain, ce qui est même improbable.
Ce chômage qui nous colle à la peau.
La figure du père de la nation va comme un gant au président, bien qu’il n’ait que la soixantaine. Il est rassurant, il se démène comme peu de ses prédécesseurs, et on le vénèrerait si le nombre de demandeurs d’emploi n’avait pas augmenté de 42 000 en octobre après une embellie en septembre. Ce chômage colle à la peau du pays comme un parasite qui dévore tout sur son passage. Or le temps raccourcit. Il ne reste que quinze mois jusqu’à l’élection présidentielle de 2017 et, si le chef de l’état ne se refait pas une santé économique et sociale dès aujourd’hui, on voit mal pourquoi il se présenterait pour un second mandat, lui qui a juré qu’il n’en ferait rien en cas d’échec sur l’emploi.
M. Hollande ne serait pas hostile à une politique économique plus draconienne et plus innovante s’il ne craignait comme la peste de perdre ses derniers soutiens à gauche. L’équilibre qu’il tente d’établir entre un semblant de majorité et une gestion compliquée de l’économie est le secret de son échec : il n’était pas désigné, ni par ses promesses de campagne ni par les forces qui l’ont élu, pour faire ce qu’ont fait d’autres pays d’Europe qui ont compris que la création d’emplois commence par la liberté aux entreprises de licencier, par une baisse sensible du coût du travail, par une régulation simple du marché de l’emploi. Mais il n’était pas fait non plus pour devenir chef de guerre, général, stratège.
M. Hollande a fait une partie du chemin, n’est pas allé assez loin. Il a nommé Emmanuel Macron pour qu’il dise à la gauche ses quatre vérités, il a plus ou moins soutenu son ministre, utilisé comme amortisseur, selon l’accueil qui lui était réservé par les syndicats et par une partie de la gauche. En économie, il faudrait, en vérité, à M. Hollande, un peu de ce courage qui lui fait affronter le malheur et passer des nuits sans sommeil, parcourant la capitale puis le monde pour être en phase avec son peuple et ses homologues étrangers. Le chômage n’est pas une malédiction, mais ce n’est plus une épidémie mondiale, c’est une maladie nationale qui ronge le pays parce qu’on n’a pas appliqué toutes les mesures qui marchent.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature