La neuvième chambre correctionnelle, présidée par M. Puget, s’est occupée aujourd’hui d’une poursuite dirigée, sur la prévention de coups et blessures, contre le directeur de l’asile des vieillards de Vanves-Malakoff, un ex-franciscain du nom de Kerrien, l’économe de cet établissement, Mazéas, un infirmier, Crozet, et une infirmière, la femme Bertrand. Il s’agit d’un asile privé… et franciscain.
M. Kerrien est inculpé d’avoir donné des ordres pour attacher avec des cordes sur son lit une vieille femme, à demi-démente, Mme Lefrançois, sous prétexte que ses promenades nocturnes troublaient le calme du dortoir. C’est la femme Bertrand qui, aidée de Crozet, aurait brutalement exécuté cet ordre. Ces deux derniers et l’économe Mazéas auraient, en outre, fait preuve, à l’égard de quelques autres vieillards d’une brutalité révoltante. C’est sur la plainte de la fille d’une des victimes, Mme Lentz, qui succomba le lendemain du jour où elle avait subi certains sévices, que le parquet fut mis en mouvement. Le bruit courait même que Mme Lentz avait été à demi étranglée.
Les constatations du Dr Socquet, médecin légiste, commis par le magistrat instructeur, n’ont pas permis de considérer ces accusations comme fondées. Mais l’information en dehors de faits établissant la mauvaise tenue, au point de vue hygiénique, de l’asile, a recueilli certains témoignages émanant, soit d’anciens pensionnaires, et sur lesquels a été fondé le renvoi des inculpés en police correctionnelle. Le directeur, l’économe, l’infirmier et l’infirmière protestent contre les témoignages, affirmant le premier qu’il n'a jamais donné aucun ordre qu’il ne puisse avouer, les autres que, s’il leur est arrivé de prendre des mesures pour empêcher quelques malades de faire du désordre, jamais elles n’ont eu le moindre caractère de brutalité.
Notons que M.Kerrien a été pendant quatorze ans frère franciscain et qu’il prétend n’avoir abandonné cet ordre que pour obéir aux dernières volontés de son père qui, à son lit de mort, lui avait recommandé de fonder un asile de vieillards.
Il a fait des acquisitions d’immeubles assez importantes. Mais il soutient que ce n’est pas le résultat des gains opérés dans l’établissement. Ces ressources, dit-il, lui viennent de la succession de son père, ancien camionneur, et de celle de sa mère.
Divers témoins à décharge qui ont été soignés dans l’établissement et qui payaient pour cela une pension annuelle de mille francs sont venus déclarer qu’ils n’avaient pour leur part aucun grief à formuler – au contraire. Mais la prévention prétend que les mauvais traitements ne s’exerçaient qu’à l’égard de pauvres diables, dont le prix de pension était des plus modiques. Telle est trop souvent l’assistance privée : une exploitation…
Le ministère public a conclu à une application sévère de la loi. À huitaine, le tribunal entendra les défenseurs et, en première ligne, Me Ménard, qui assiste M. Kerrien.
(Le Progrès médical, janvier 1900)
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