Dans le Blésois, quand la maladie reste en suspens, sans amélioration ni diminution et qu’on a essayé de tous les remèdes sans résultat, il faut invoquer saint My ou tenter un suprême effort à la fontaine Saint-Urbain de Sambin qui, dans l’occasion, est précieuse pour révéler le sort du malade. Cette fontaine miraculeuse qui avait, entre autres propriétés, celle de « débêter les pauvres d’esprit » n’existe plus depuis la reconstruction de l’église actuelle. Les gens qui avaient un moribond (il fallait qu’il fût moribond, condition essentielle) et voulaient savoir s’il guérirait, allaient acheter chez le forgeron d’en face un fer à cheval qu’on forgeait et jetait rouge encore dans la fontaine. Si ce fer surnageait, le malade se relevait aussitôt ou mourait, dans le cas contraire. Oncques ne le vit jamais flotter. L’eau ne mentait jamais, la confiance persistait, soigneusement entretenue, et pendant que sonnait le glas, le forgeron l’accompagnait de son marteau, en frappant en cadence le fer d’un autre qui devait mourir.
Comme partout, la chouette est un présage de mort, surtout si elle s’arrête sur le faîte d’une maison en chantant, sinistre et lugubre, jusqu’à ce que la mort qu’elle précède ait passé.
Il faut prévenir les abeilles de la mort de leur maître, leur mettre un crêpe noir et ne jamais coucher un mort sur la table de la chambre pour qu’il ne meure personne de la famille dans l’année ; et, surtout, au moment de la mort, ouvrir la fenêtre et vider le seau d’eau. On ouvre la fenêtre pour que l’esprit puisse s’en aller et on jette l’eau pour qu’il ne se noie pas. C’est là le développement et la persistance atavique de la théorie de Bordier (Évolution des idées médicales, Revue de l’école d’anthropologie, février 1893). L’esprit est un élément impondérable et subtil qui se dégage de son enveloppe matérielle pour s’élancer dans le vide. Aussi doit-on ouvrir la fenêtre et voiler les glaces pour qu’il n’y ait pas de confusion à cet égard.
Dans la même idée, les populations néolithiques faisaient mieux : elles trépanaient leurs morts pour que l’esprit s’évade, et trépanaient encore les vivants ; de même qu’au Moyen Âge et en Kabylie quand ils étaient possédés du démon.
Pour une raison qui paraît moins claire, on jette tout ce qu’il y a de comestible dans la chambre où il vient de mourir quelqu’un… Est-ce par crainte qu’il ne trouve pas sa subsistance dans un monde dit meilleur qu’on lui donne des provisions ?
Enfin, quand un enfant naît le jour de la mort d’un vieillard, c’est un présage de longue vie. Il vivra autant de jours qu’en a vécu le vieillard car l’esprit de celui qui part, au lieu d’errer dans l’infini, ira recommencer une vie nouvelle dans le corps de l’enfant. Voilà une théorie arriviste qui vient de loin et n’est qu’une ultime édition de la métempsychose des Hindous.
(Dr François Houssay, Chronique médicale, 1902)
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