Cancer du poumon

Toujours plus de patients sous immunothérapie ?

Par
Publié le 19/06/2018
immunothérapie

immunothérapie
Crédit photo : phanie

Suite aux derniers résultats de l’étude Keynote-189 montrant l’efficacité du pembrolizumab (Keytruda), anticorps anti-PDL1, en association à la chimiothérapie chez les patients atteints de cancer bronchique non à petites cellules (CBNPC) non épidermoïde (2/3 des CBNPC), l’essai Keynote-407 s’est intéressé aux patients avec un cancer épidermoïde (1/3 des CBNPC). En effet, cette étude de phase III présentée au congrès de l’American Society of Clinical Oncology (ASCO) compare, chez 559 patients avec un CBNPC épidermoïde métastatique, le pembrolizumab associé à la chimiothérapie (carboplatine/paclitaxel ou nab-paclitaxel) par rapport à cette même chimiothérapie seule. 

Une survie augmentée de 4 mois avec l’association

En première intention, l’ajout du pembrolizumab à la chimiothérapie améliore significativement la survie globale (SG : 15,9 mois avec la combinaison versus 11,3 mois pour la chimiothérapie seule, p = 0,0008), soit une réduction du risque de décès de 36 % (HR = 0,64). « Ce bénéfice de 4 mois en survie globale est cliniquement pertinent chez ces patients de mauvais pronostic », commente le Pr Christos Chouaid (CHI de Créteil). De même, l’association de l’immunothérapie à la chimiothérapie augmente la survie sans progression (SSP : 6,6 versus 4,8 mois, p < 0,0001), réduisant ainsi le risque de progression ou de décès de 44 % (HR = 0,56). Le taux de réponse est également plus élevé avec la combinaison (RO : 58,4 % versus 35 %, p = 0,0004). Ainsi, « l’étude Keynote 407 est positive en RO, SSP et SG quel que soit le niveau d’expression de PDL1 », confirme le Pr Maurice Pérol (centre Léon Bérard à Lyon). « Les essais Keynote-189 et 407 permettent d’augmenter la proportion de patients pouvant recevoir de l’immunothérapie dès le diagnostic car il n’y a pas de sélection selon le taux de PDL1. Mais si associer d’emblée chimiothérapie et immunothérapie semble bénéfique pour les patients, c’est au prix d’une toxicité additive », ajoute le Pr Chouaid. 

Une efficacité quelle que soit l’expression de PDL1 ?

Une autre étude, présentée à l’ASCO en session plénière, a évalué l’efficacité du pembrolizumab seul en fonction du niveau d’expression du marqueur PDL1. En effet, si le pembrolizumab est aujourd’hui homologué et utilisé chez les patients avec une expression de PDL1 supérieure à 50 %, son intérêt restait à démontrer en cas d’expression inférieure à 50 %. Ainsi, l’essai Keynote-042 a comparé, chez 1274 patients atteints de CBNPC, le pembrolizumab en monothérapie par rapport à une chimiothérapie à base de platine (carboplatine/paclitaxel ou carboplatine/pemetrexed), en première ligne métastatique. Les résultats ont été analysés de manière hiérarchique selon 3 groupes de patients en fonction de leur niveau d’expression de PDL1 : ≥ 50 %, ≥ 20 % (comprenant les patients du groupe précédent) et ≥ 1 % (comprenant l’ensemble des patients). Quel que soit le groupe de patient, la survie globale était significativement supérieure : 20 vs 12,2 mois avec PDL1≥50 %, 17,7 vs 13 mois avec PDL1≥20 % et 16,7 vs 12,1 mois avec PDL1≥1 %. « Au total, le bénéfice en survie est positif mais porté essentiellement par les patients exprimant PDL1 à plus de 50 %. Entre 1 et 49 %, il n’y a plus de bénéfice en survie. Les indications du pembrolizumab ne peuvent donc pas s’étendre aux patients à moins de 50 %. Cela ne va pas changer les pratiques. », commente le Pr Pérol. De plus, dans cet essai, la survie sans progression n’est pas significativement améliorée avec le pembrolizumab. 

Vers une prise en charge personnalisée ?

« En pratique, entre 1 et 49 % d’expression de PDL1, le standard va être l’association chimiothérapie-immunothérapie, indique le Pr Pérol. On va avoir un dilemme chez les patients exprimant PDL1 à plus de 50 %. Si ces patients ont de gros volumes tumoraux ou des métastases à risque, on fera la combinaison. Si la maladie est plus indolente, on traitera par immunothérapie seule. De plus, la monothérapie laisse la possibilité de faire la chimiothérapie en deuxième ligne ».

Pour le Pr Chouaid, « Le PDL1 est un marqueur imparfait. D’autres marqueurs comme la charge mutationnelle, qui correspond à l’instabilité du tissu génétique, aideront à personnaliser la prise en charge initiale ». 

D’après les communications orales des Drs Luis G. Paz-Ares et Gilberto Lopes à l’ASCO (3 juin 2018), et les entretiens des Pr Christos Chouaid et Maurice Pérol.

Karelle Goutorbe

Source : lequotidiendumedecin.fr