MANITUDE : 4 000 patients et 1 000 psychiatres

Une étude sur le virage maniaque dans les troubles bipolaires

Publié le 15/01/2010
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LES TROUBLES BIPOLAIRES sont des affections psychiatriques chroniques dont la prévalence sur une vie entière au sein de la population générale est estimée à environ 1 à 2 %.

Cette maladie se caractérise par la survenue répétée d’épisodes dépressifs, maniaques, hypomaniaques ou mixtes, séparés par des intervalles libres.

Les épisodes dépressifs bipolaires sont les plus fréquents ; ils se distinguent des épisodes dépressifs unipolaires par des particularités séméiologiques (une hypersomnie plutôt que des insomnies, une hyperphagie plutôt qu’une perte d’appétit, un ralentissement moteur plus important, une hyperréactivité émotionnelle), des particularités évolutives (récurrences fréquentes, risque suicidaire majeur) et thérapeutiques (une résistance au traitement et surtout un risque de virage de l’humeur vers la polarité maniaque et/ou de cycles courts et rapides sous antidépresseur).

Les modalités de traitement d’un épisode dépressif bipolaire restent à ce jour paradoxales. La plupart des conférences de consensus internationales ne préconisent l’utilisation des antidépresseurs ni en première intention ni en monothérapie ; or en pratique clinique, la plupart des praticiens ont recours à ces traitements pour traiter leurs patients bipolaires lors de leurs épisodes dépressifs.

Altérations de la neuroplasticité.

Les données actuelles ne permettent pas de distinguer les différents antidépresseurs susceptibles d’induire un virage maniaque ou des cycles courts ou rapides. Toutefois, certains auteurs suggèrent que ce risque est le plus élevé avec les antidépresseurs tricycliques. Par ailleurs, plusieurs résultats récents montrent que les troubles bipolaires sont associés à des altérations de la neuroplasticité. On a observé chez les patients bipolaires des anomalies structurales (élargissement des ventricules avec diminution de la substance grise, réduction des volumes des amygdales de l’hippocampe) et des anomalies fonctionnelles (diminution du métabolisme frontal lors des phases dépressives). Ces données éclairent sur le fonctionnement d’un thymorégulateur comme le lithium et confirment l’intérêt de nouvelles voies de traitement agissant sur la plasticité cellulaire et l’inhibition de la sécrétion de glutamate.

MANITUDE, visait à explorer la survenue de virages de l’humeur chez des patients déprimés bipolaires traités par des antidépresseurs aux modes d’action différents (tianeptine, IRS, IRSNa + tricycliques).

Entre décembre 2006 et mars 2007, 1 000 psychiatres ont suivi chacun 4 patients bipolaires dépressifs pendant six mois en surveillant l’évolution de l’humeur dépressive, la survenue d’un éventuel virage maniaque ou d’une accélération cyclique de la maladie.

Cette étude observationnelle menée chez des patients jeunes (moyenne d’âge 44 ans) auxquels les médecins pouvaient prescrire un antidépresseur de leur choix. Il en ressort que la tianeptine (Stablon), en plus de son efficacité sur l’humeur dépressive y compris dans les dépressions sévères, a induit trois fois moins de virages maniaques que tout autre antidépresseur et ce, aux différents temps du traitement.

Conférence de presse organisée par Ardix Médical.

* Hôpital Sainte-Anne Paris.

Dr MICHELINE FOURCADE

Source : Le Quotidien du Médecin: 8687