Vive émotion après le décès de Simone Veil

Publié le 30/06/2017
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Crédit photo : Voisin/Phanie

Une "cérémonie d'obsèques officielles" sera organisée mercredi après-midi dans la cour des Invalides pour rendre hommage à Simone Veil, décédée vendredi, en présence du chef de l’État Emmanuel Macron qui prononcera un discours. "Le jour de la cérémonie, les drapeaux européens seront mis en berne tandis que les drapeaux français seront parés d'un crêpe noir" sur les bâtiments officiels, a annoncé l'Elysée.

Celle qui a été par deux fois ministre de la santé s'en est allée ce vendredi matin à l'âge de 89 ans. Elle restera dans l'histoire pour sa loi de 1975 sur la dépénalisation de l'avortement en France. Cette magistrate de formation rescapée des camps d'Auschwitz-Birkenau a été ministre de la Santé une première fois entre 1974 et 1979 sous Valéry Giscard d'Estaing, à une époque où les femmes ministres n'étaient pas légion. Son arrivée avenue de Ségur est marquée par la mise en œuvre de l'une des deux importantes réformes de société promise par le jeune président : la légalisation de l'IVG. Sur BFM-TV, ce dernier se remémorait vendredi matin le choix de Simone Veil pour être la première femme ministre de la Santé. Rappelant, le contexte difficile autour de l'IVG, l'ancien président explique : "Elle exerçait des fonctions administratives importantes. C'était une personne d'une grande compétence et d'une grande indépendance d'esprit. Or je souhaitai que ce soit une personnalité forte et représentative qui conduise ce débat." Le débat fut pourtant difficile dans un hémicycle masculin qui laissera Simone Veil visiblement épuisée. Mais sa loi ne fut jamais remise en cause et même confortée : la gauche organisant, dix ans plus tard, le remboursement de l'IVG, puis, il y a quatre ans, sa prise en charge à 100 %. "Je remercie Simone Veil d'avoir permis aux femmes d'avorter librement, et d'avoir permis à des soignants de les aider librement à le faire," tweettait vendredi Martin Winckler.

A la même époque, elle met aussi en place les premlières mesures de réglementation du tabac avec la loi de juillet 1976. L'Alliance contre le tabac s'en souvient, qui célèbre une Simone Veil qui a "initié la prise de conscience des leaders d'opinion et de l'opinion publique des méfaits du tabagisme et de l'ingérence des industriels du tabac". 

Elle redevient ministre de la Santé en 1993 dans le gouvernement de cohabitation d'Edouard Balladur. Pour ce retour avenue de Ségur, elle est en tandem avec un jeune secrétaire d'Etat, le cardiologue Philippe Douste-Blazy. L'époque est budgétairement moins faste et son second passage sera marqué par le plan Veil d'août 1993, qui baisse les remboursements de l'assurance maladie.

Entre ses deux passages au ministère de la Santé, cette Européenne convaincue a aussi été Présidente du Parlement européen, alors que celui-ci était, en 1979, pour la première fois élu au suffrage universel. Elle termine sa vie publique au Conseil Constitutionnel au tournant des années 1990 et 2000.

Ces derniers mois, elle s'était retirée de la vie publique. Une de ses dernières apparitions fut à l'Elysée en septembre 2012. Le président Hollande lui avait alors remis les insignes de Grand Croix de la Légion d'Honneur, la plus haute distinction de cet ordre. Moins consensuel : on l'a aussi aperçue parmi les manifestants lors des contestations sur le mariage pour tous en 2013.

En dépit de sa discrétion de ces dernières années, elle figurait toujours en tête du palmarès des personnalités préférées des Français. En août 2016, l'IFOP pour le Journal du dimanche la plaçait en troisième position de ce classement et deuxième auprès des femmes. En effet, elle restera comme un symbole de la lutte pour les droits des femmes avec notamment la loi de 1975 qui porte son nom sur l'IVG.

Son discours lors de la loi sur l'IVG le 26 novembre 1974

En 2010, elle entre à l'Académie française sur le fauteuil de l'ancien Premier ministre Pierre Messmer. Le jour de sa reception sous la Coupole, c'est son numéro de matricule à Auschwitz qui est gravé sur l'épée d'Immortelle qu'on lui remet.

Pour l'anecdote, Simone Veil avait été un temps la belle-mère d'Agnès Buzyn, actuelle locataire du 14 avenue Duquesne, lorsque celle-ci partageait sa vie avec Pierre-François Veil.

Hommages de ses successeurs avenue de Ségur

À l'annonce du décès de l'ancienne ministre, l'émotion dans la classe politique a été immense et les hommages nombreux de tous les bords de l'échiquier. À commencer l'actuelle ministre de la Santé. Dans un communiqué, Agnès Buzyn voit dans Simone Veil "une femme de conviction" et une "ministre courageuse qui a mené le combat en faveur des droits des femmes". Soulignant "les liens personnels" qui l'unissaient à l'ancienne ministre, Agnès Buzyn promet que, dans ses fonctions, elle "se rappellera de Simone Veil comme d’un exemple de ténacité et de droiture dans la conduite de réformes qui ont profondément changé la vie de nos concitoyens." Et dans les médias la ministre a livré un témoignange proche etémouvant.

Parmi les anciens ministres de la Santé, Marisol Touraine salue la "femme de courage et d'engagement pour les droits et libertés des femmes" et sur l'IVG, cette "loi Veil devenue loi iconique." "Une femme s'est battue pour toutes les femmes dans une France et une Assemblée dominées par les hommes", ajoute-t-elle. "Émotion et chagrin intenses" aussi chez Roselyne Bachelot qui voit en Simone Veil, "un modèle, une grande dame." "Merci Simone pour ce que vous avez fait pour la France et pour les femmes," abonde Martine Aubry. Pour sa part, Xavier Bertrand -qui fut lui aussi, deux fois en charge de la Santé- choisit la sobriété, évoquant sa "profonde tristesse à l'annonce du décès de Simone Veil, une grande figure de liberté, d'espérance et de courage." "Simone Veil mérite le Panthéon" résume Bernard Kouchner sur BFMTV.

Emotion dans toute la classe politique

Hors du sérail des ministres et anciens ministres de la Santé, les plus hautes autorités de l'Etat lui rendent hommage. Emmanuel Macron a souhaité que "son exemple" puisse "inspirer nos compatriotes", en énumérant son combat pour les femmes "quand elle porta avec un courage inlassable la loi sur l’interruption volontaire de grossesse, qui mit un terme à tant de situations inhumaines". Le Premier ministre Edouard Philippe a également rendu hommage à Simone Veil qui "restera le visage d'une République debout, humaine, généreuse".

Ceux qui l'ont côtoyée se souviennent aussi. À commencer par Édouard Balladur, qui estime que "sa personne et son histoire faisait honneur à notre pays". Barbara Pompili, ancienne secrétaire d'Etat à la Biodiversité salue "une grande dame, à qui nous devons beaucoup…" Benoît Hamon, "s''incline à la nouvelle du décès de Simone Veil, survivante de la Shoah, ministre de la loi IVG, inlassable européenne."

Bernard Accoyer, secrétaire général des Républicains estime que "nous perdons une des 'grandes femmes de notre temps, un modèle de courage et d'humanité. Elle était un exemple, elle laissera un vide immense". Najat Valaud-Belkacem, ex-ministre de l'Education nationale se fait lyrique, citant André Chedid "en hommage à une très grande dame". En écho, Jean-Luc Mélenchon, chef de file de La France insoumise rappelle que "Madame Veil appartient au meilleur de notre Histoire. Et son nom vivra dans notre gratitude pour toujours." Quant à Alain Juppé, ex-Premier ministre il évoque "tristesse" et "profond respect pour la femme politique, son courage, son audace dans le combat pour la condition féminine". Valérie Pécresse, présidente de la région Île-de-France salue aussi "cette grande dame de la politique fut pour moi à la fois inspiratrice, soutien & amie."


Source : lequotidiendumedecin.fr