La féminisation des études de médecine et des spécialités chirurgicales est en train de bouleverser la pratique des professions médicales. Ce problème touche en particulier la chirurgie. Il entraîne une hyperspécialisation avec une baisse constante pour la chirurgie viscérale du nombre de spécialistes. Nos consœurs sont arrivées à la rescousse. Elles sont très performantes car, pour opérer, le chirurgien doit avoir de l'habileté, « des mains de femmes ».
L'histoire des femmes en chirurgie remonte à 3 500 ans avant JC., dans des pays comme l'Égypte, l'Italie et la Grèce. À la période hippocratique elles ont été les maîtres de l’obstétrique. Une partie des connaissances chirurgicales sera importée de Grèce à Rome. De nouvelles techniques sont mises au point comme les premières césariennes. Metrodora, qu’on peut qualifier de gynécologue, écrit un ouvrage traitant de toutes les maladies de l’utérus. À cette époque, les femmes médecins n’étaient nullement pourchassées au nom de la religion.
Au Moyen Âge, ces activités étaient « un sacerdoce » ; et la femme exclue de par la loi de la médecine, alors que l’école de Salerne était alors accessible aux deux sexes. Certaines pourtant la pratiquent en reprenant les activités de leurs compagnons. Dame Trotula fut une pionnière pour la gynécologie. On lui attribue plusieurs ouvrages traitant de la santé féminine.
Au XIXe siècle, la médecine monastique (Saint Côme) cède alors le pas aux universités mais les femmes restent exclues. Au XXe siècle, la situation va évoluer rapidement. Francine Leca a été la première femme à être devenue chirurgien cardiaque en France, et cheffe des services de chirurgie cardiaque des hôpitaux Laennec puis de Necker (Paris) jusqu’en 2003. Elle avait fondé en 1996, avec Patrice Roynette, l’association Mécénat Chirurgie Cardiaque - Enfant du Monde qui récoltait des fonds pour réparer les cœurs d’enfants venus des pays défavorisés atteints de graves maladies cardiaques. Plus de 2 000 enfants ont été opérés dans douze hôpitaux en France grâce à cette organisation et à son réseau constitué de 300 familles d’accueil, 150 bénévoles.
Le Pr. Claire Nihoul-Fékété, qui fut chirurgien des hôpitaux, chef du Service de chirurgie pédiatrique viscérale à l'hôpital Necker Enfants Malades est un autre exemple. Françoise Firmin est une référence mondiale de la reconstruction des oreilles avec plus de 3000 reconstructions réalisées. Il y en a bien d’autres qui voudront bien m’excuser de ne pas les citer.
De plus en plus de femmes dans les blocs
Actuellement, nos collègues sont jeunes car cette évolution est un phénomène récent. Elles sont de plus en plus nombreuses dans les blocs comme tous les acteurs et font souvent face aux regards étonnés de leurs patients. Kathleen Turner est chirurgienne de la greffe du foie. Quatre femmes exercent aux côtés de son patron le professeur Boudjema à Rennes
L’hyper spécialisation pose des problèmes pour les urgences. Nombre d’entre elles seront moins disponibles à certaines périodes de leur carrière. Pour pallier cette pénurie, nos brillants penseurs ont eu une idée lumineuse : « la délégation de tâche aux professions intermédiaires »...et donc de les former en allongeant les études.
Cela participe à la pénurie des infirmières, situation déjà préoccupante. Aujourd'hui, l'article 30 de la loi santé prévoit la création de professions intermédiaires. Cela donne accès au statut particulier de professionnels médicaux en « pratiques avancées ». Cette disposition permet aux professionnels concernés de travailler en autonomie, d'établir une évaluation clinique, de définir un diagnostic et de réaliser un acte technique
Ainsi des infirmiers en pratique avancée : au service de tous depuis 60 ans pour l’anesthésie (IADE), cette profession, qui n'existait que dans les textes, n’était pas réellement reconnue! Les infirmiers en pratique avancée disposent de compétences élargies, véritable interface entre l’exercice infirmier et l’exercice médical. Cette nouvelle pratique et ces nouvelles compétences bénéficieront d’une reconnaissance en termes de statut et de rémunération, aussi bien dans le cadre de la fonction publique hospitalière qu’au sein des équipes de soins primaires.
Notre système de soins avec toutes ces réformes et avec la pandémie est en situation de crise. Comment va-t-on en sortir? Il faudra augmenter le nombre de médecins bien formés à la sortie de la faculté... Ce n'est pas dans les tuyaux avec Ségur!
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Exergue :
Appendicite et antibiotiques
La « foire à la saucisse » vraiment ?
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