Courrier des lecteurs

La vaccination Covid-19, une charge de plus pour les généralistes

Publié le 05/02/2021

Suite aux déclarations conjointes des politiques et des médias (ils ne se privent pas d’ailleurs de répéter en boucle le message), la vaccination des seniors a pu débuter dans un climat d’angoisse éprouvée par de nombreux Français.

Pour permettre « aisément » aux patients appartenant à cette classe d’âge (les plus de 75 ans) de recevoir l’injection salvatrice, les énarques ont mis en place des plateformes téléphoniques ou des e-rendez-vous (ils sont gérés dans la majeure partie des cas par des sociétés privées aguerries à cet exercice).

Tout pourrait aller pour le mieux dans le meilleur des mondes si une saturation, de ces structures dédiées à la vaccination, n’avait pas été observée dès le 1er jour de leur mise en service.

Dès lors, les patients pouvant prétendre à cette vaccination se sont tournés vers les généralistes (ce sont les premiers interlocuteurs consultés dans le cas de problématiques de santé).

De nombreuses demandes ont été formulées : pour savoir les tenants et les aboutissants concernant cette saturation, la façon dont le généraliste peut intervenir pour les inscrire sur les sites dédiés au Covid-19, les raisons qui ne leur permettent pas de se vacciner chez leur médecin, la manière dont les personnes ne pouvant se déplacer pourront se faire vacciner, le type de vaccin (Pfizer, Moderna ou Astra) qui permet une protection optimale sans effets secondaires, et bien entendu la question de l’intérêt d’une vaccination pour le Covid-19.

De telles interrogations pourraient faire sourire, malheureusement elles sont souvent répétitives et lassantes car les généralistes ont une charge de travail importante. De plus, il est difficile pour nous de répondre à certaines de ces questions car nous n’avons pas eu d’informations complètes sur tous les aspects de cette vaccination.

Cet état de fait contribue fréquemment à majorer les tensions entre le médecin et son patient, lesquels comprennent difficilement que les médecins ne soient pas informés de manière précise sur ce sujet. Nombreux sont nos concitoyens qui ne comprennent pas pourquoi les médecins n’ont pas la main sur la gestion et la communication dans ce domaine.

Ce malentendu est source d’irritabilité et de désarroi de nombreux confrères qui se sentent impuissants par rapport à une situation inédite mais aussi mal gérée. Cela contribue parfois à assurer une gestion des patients ayant des pathologies graves de façon moins efficace.

Donner un signal fort aux Français

Pourquoi nos dirigeants n’expliquent-ils pas les raisons de cette désorganisation en ce qui concerne la vaccination plutôt que de laisser les professionnels de santé gérer une situation difficilement acceptable ? Pourquoi ne pas avoir anticipé le succès des plateformes via le Net et le numéro d’appel en 0800, et éviter de ce fait une saturation prévisible ? Cela aurait pu être résolu avant la mise en place de ces plateformes si le personnel pressenti pour prendre en charge cette situation était en nombre suffisant.

Pourquoi ne pas expliquer de manière claire les raisons (pénurie de vaccins) qui poussent les centres dédiés à cette vaccination à ne pas accepter de réservation avant plusieurs semaines (certains centres d’ailleurs ne donnent pas de rendez-vous car ils sont déjà saturés) ?

De toute manière, nous verrons dans un futur proche comment l’exécutif va régler la gestion de la vaccination des Français. C’est de cette façon que nous pourrons voir si l’État a la capacité de rebondir lors d’une crise sanitaire.

Pour finir, il est important de souligner l’implication des libéraux (médecins et paramédicaux) qui ne déméritent pas pour assurer la vaccination des patients.

Nombreux sont ceux qui ont répondu dès le premier jour de la mise en place des centres de vaccination (c’est mieux que le terme de « vaccinodromes » que notre ministre de la Santé avait politiquement critiqué pour la grippe H1N1). Comme quoi les libéraux, même s’ils sont souvent vilipendés par les médias et les politiques, restent plus souvent que nous le pensons des humanistes.

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Dr Pierre Frances, médecin généraliste, Banyuls-sur-mer (66)

Source : Le Quotidien du médecin