Cette nuance anglophone vs francophone entre langue maternelle et langue de naissance est une différence qui va bien au-delà de la sémantique à l’heure où enfin émerge officiellement la question de l’identité des peuples européens, et spécialement du nôtre, le peuple français.
Il est évident que l’identité d’une nation est d’abord et avant tout établie sur sa langue parlée et écrite. Elle s’est bâtie sur plusieurs siècles, elle est le locus principal de notre ADN de français.
Tout immigré qui souhaite vivre dans un pays qui n’est pas son lieu de naissance, se doit donc d’acquérir d’abord le minimum nécessaire à la communication avec ses nouveaux concitoyens, mais ne pas s’arrêter là, et poursuivre par tous les moyens, son apprentissage aux domaines plus sophistiqués de la littérature et de l’histoire afin de s’approprier une identité qui n’était pas initialement la sienne. Ce perfectionnement, qui ne se contente pas du langage domestique est le seul moyen de se faire accepter sans que les signes extérieurs de son origine le singularisent du reste de la population.
Quel plaisir d’entendre des concitoyens venus d’ailleurs, maîtriser avec dextérité toutes les subtilités de la langue française. Leur existence a une signification hautement symbolique : la volonté affichée par leurs géniteurs de leur faire adopter - sans la moindre ambiguïté - l’instruction et la culture de notre patrie. Nombreux sont, aujourd’hui, ceux qui dans de multiples milieux professionnels en font aujourd’hui la démonstration.
Des grands médecins d'origine étrangère aux plus hautes responsabilités
La pandémie Covid a fait connaître, sur les plateaux de télévision, des collègues, qui infectiologues, qui réanimateurs ont accédé aux plus hautes responsabilités hospitalières et dont l’origine géographique ne fait pas de doute. Ils ont témoigné de leur haute compétence, de leur travail d’appropriation lexicale, et partant de notre culture.
La question est donc, pourquoi ceux, pourtant présents sur notre sol depuis des années, pourtant passés par l’école publique, continuent-ils à utiliser leur langue maternelle entre eux et communiquent dans un langage approximatif voire dévoyé ? Tout le mal est résumé dans ce qualificatif malheureux : « maternel » que nous utilisons pour désigner notre langue habituelle, notre première langue transmise par la mère et non par la société. En utilisant le qualificatif « de naissance », le monde anglosaxon introduit au contraire une rupture avec le moyen de communication intrafamilial. On parle la langue de l’endroit où on est né et non pas la langue transmise par le sein qui vous a porté. Cette différence sémantique est fondamentale, car dès les premiers moments de la vie, elle prescrit inconsciemment à l’enfant qui entend parler la langue d’origine et non pas d’adoption, que de facto celle qui est parlée à l’extérieur de la circonscription familiale est une langue étrangère.
Le regroupement communautaire par culture d’origine conjugué à l’échec scolaire ne fait ensuite qu’aggraver le particularisme individuel, augmenter la réticence à l’instruction républicaine, et aboutit finalement au « séparatisme » que le communautarisme politico-religieux n’a pas de mal à détourner vers des sentiments de refus voire de haine à l’égard du pays d’accueil et de sa population.
Nous en sommes là aujourd’hui, et la décision qui vient d’être prise d’imposer la scolarité à 3 ans en institution publique ou sous contrat est sans aucun doute un ingrédient susceptible de substituer le terme « de naissance » à celui de « maternelle ». Mais attention, quel contrôle au sein de la famille ?
Souvenez-vous de Paul Valery qui, dans le train qui le ramenait de Paris à Sète, voyageait dans un compartiment où se trouvait une famille avec un enfant qu’il avait eu le temps d’observer. Il avait eu ce jugement cinglant : [Après 3 ans, c’est trop tard…]
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