Nous l’avons tous compris, il faut porter un masque pour limiter l’épidémie !
Chirurgien, le port d’un masque n’est pas un vrai problème pour moi, mais le type de masque, c’est comme un uniforme, il y a différentes façons de le porter. Surtout les élastiques qui nous découpent les oreilles, n’ont pas la faveur des chirurgiens habitués à nouer les cordons derrière la tête, à la bonne tension pour pouvoir respirer et à les passer sous les lunettes pour éviter la buée.
Se laver les mains et les gels alccoliques ne nous posent pas non plus de problème majeur, même si au cours des décades passées, le brossage, sa durée et la solution antiseptique ont varié au gré des décisions des CLIN (Comité de Lutte contre les Infections Nosocomiales).
Mais c’était en salle d’opération, espace clos s’il en fut et comme dans les rituels magiques, il fallait aussi passer une tenue spéciale, porter des bottes et des chapeaux pour pouvoir passer à l’acte, comme disent les Anglais rentrer dans le « Operating theater room », donc jouer un rôle dans une pièce aux règles bien établies, avec des textes plus ou moins bien maîtrisés selon les acteurs.
Je ne suis pas psychanalyste et encore moins Lacanien mais lorsque le masque sort de la salle d’opération le symbole du bâillon me vient immédiatement à l’esprit.
Le port du masque est un bâillon que porte toute une population sous les incitations multiples, de la presse, de la radio, répétées à l’infini dans les transports en commun.
Tout le monde doit le porter faute d’une contravention à 135 €, pourquoi pas un permis à point avec confinement obligatoire après 5 procès verbaux, d’ailleurs on a bien proposé de nous tracer sur nos smart phones.
Nous ne nous comprenons plus…
Oui nous sommes bâillonnés, de force, nous ne nous entendons plus, ne nous comprenons plus, obligés de hausser le ton pour se faire comprendre. Dans le bus ou le train les « autres » vous regardent d’un œil mauvais si par hasard votre masque vient à glisser. La délation sournoise rampe, à l’égard de ceux qui ne portent pas le masque.
Il est vrai que les Français font preuve d’une grande créativité dans les masques en tissu et un grand couturier a même mis sur le marché une visière casquette, à 700 € !
Les enseignants n’arrivent plus à se faire entendre par leurs élèves, nous n’entendons pas ce que disent nos patients et ils n’entendent pas ce que nous leur disons.
Bâillonnés, confinés, avec l’interdiction de se réunir à plus de 10,20, 1 000 selon le lieu ouvert où non.
Encore heureux, on a le droit de retirer le masque pour mangeret boire, mais il faut le porter pour entrer et sortir du restaurant, ce qui donne, chacun d’entre nous en a fait l’expérience, des situations ubuesques.
Mais direz vous les asiatiques qui portent des masques, en Corée, à Singapour, en Chine ont pu contenir l’épidémie grâce aux masques. C’est bien connu que ces pays sont caractérisés par la liberté d’expression !
Les femmes qui portent le voile sont-elles protégées plus que leurs conjoints qui n’en portent pas et sans vouloir polémiquer sur le voile, celui-ci n’est pas l’expression la plus caractéristique de la liberté d’expression.
Seul avantage, il cache les bas de visage ingrats et donne au regard une dimension oubliée dans la séduction. Mais il est parfois difficile dans les conversations de se limiter au regard et au plissement d’un coin de l’œil pour savoir ce que pense un interlocuteur qu’on entend mal, avec une voix assourdie.
Quand pourrons nous retirer nos bâillons, personne ne le sait, scientifiques et politiques s’accordent cependant à les trouver bien commodes.
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