Ayant lu les courriers des Drs Bernard Riou (Dépeçage organisé) et Isabelle Hodouin (Revalos : ma supplique à Emmanuel Macron) parus dans « Le Quotidien du Médecin » le 22 avril, voici ma réaction, en particulier à la phrase : « les pouvoirs publics ont prévu de démanteler la structure de votre exercice avec l’agrément du conseil de l'Ordre et la bénédiction de vos syndicats. »
Pourquoi avaient-ils déjà freiné la formation de gynéco obstétriciens il y a 40 ans au profit d’un monitoring robotisé alignant les futures parturientes dans des box sous surveillance électronique ? Les taches du soin sont dépréciées. On ne les considère plus comme le cœur du métier. Le travail du soin n’est pas créatif, ni consommateur. Alors que le robot, si.
C’est notre tour… Après l’abattage industriel des cochons puis l’industrie automobile (Ford) etc. ils demeurent dans une logique productiviste qui épuise les sols (on le sait déjà) mais aussi les hommes.
Les soignants que nous sommes sont à présent au bas de l’échelle, tout comme les agents d’entretien. Ils fantasment sur la disparition du travail humain*. Et pourtant dans le domaine du soin et du ménage, c’est impossible. On l’a vu depuis deux ans. Regardez ce que vaut un C ou une CS (accueil, mise en condition, interrogatoire, examen clinique, diagnostic, gestes techniques, ordonnance et conseils) : 25 ou 30 euros. Il est impensable pour eux de valoriser cela. Ils nous poussent à utiliser, lorsqu’elle existe, la codification des actes techniques qui est en effet nettement mieux payée, ce qui est paradoxal. Comme si notre travail se réduisait à cela !
Ces « hommes » et « femmes » des pouvoirs publics sont eux-mêmes déresponsabilisés, mais performants derrière leurs écrans, totalement investis dans leur travail et désireux d’obéir*.
Comment se défendre ? Les médecins sont peu nombreux et rarement syndiqués (le mot fait peur) et puis, nous avons tous le nez dans le guidon. Seuls les abonnés non-médecins du « Quotidien du Médecin » s’intéressent à nos petits syndicats impuissants. Ils s’empressent de faire des courbes comparatives de nos syndicats sur leur dernier logiciel high-tech.
Mais depuis un an, un syndicat (SLS, le Syndicat Liberté Santé) regroupant tous les soignants de France (pharmaciens, médecins, infirmiers, aides-soignants, pompiers) et acteurs proches du soin (techniciens, administrateurs, secrétaires.) existe. Il est né en raison de l’obligation pour les soignants, d’une injection aux conséquences alors inconnues à moyen et long terme. Il soutient humainement, juridiquement, financièrement grâce à vos dons, les blouses souvent blanches (même non-inscrites au SLS) licenciées, suspendues, sans salaires ou interdites d’exercer, ou empêchées de prescrire, accusées d’abandon de clientèle ou radiées de leur Ordre après avoir été infantilisées puis menacées au cours « d’entretiens confraternels ».
Arriverons-nous (tous) à reprendre possession de notre travail ? Le travail est le lieu où se joue notre condition humaine.
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*Ref: Fanny Lederlin: Les dépossédés de l'open space
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