« Le Quotidien » a mis en lumière le 2 décembre sur son site le fait que l’activité des HAD (hospitalisation à domicile) était en recul en 2022. Élisabeth Hubert qui préside la Fnehad (Fédération nationale des établissements d'hospitalisation à domicile) explique ce manque « d’attractivité » par une absence de réactivité des soignants pour mandater ce type de structures. Au détriment, dit-elle, de la santé de certains patients. Sa réflexion est partisane, et me semble déplacée. Parallèlement elle met en avant, un autre élément qui la dérange beaucoup plus : le manque de confiance de certains hospitaliers, ces professionnels n’ayant pas, à leurs yeux, les capacités de prendre en charge les patients de manière convenable.
Dans les faits, comment les patients sont-ils pris en charge par ces unités ? Tout d’abord il est certain que les HAD n’ont pas toutes les mêmes façons d’œuvrer, et d’apporter leur soutien aux libéraux. Souvent d’ailleurs, c'est par une HAD que ces derniers sont avertis du retour au domicile de leur patient, sans avoir eu de discussion avec le confrère hospitalier.
Cette situation illustre le manque de communication entre deux mondes qui s’ignorent parfois, mais surtout la manière dont la gestion du patient par l’équipe libérale est jugée par les hospitaliers. Le plus souvent, les HAD sont pilotées par des médecins qui dirigent, depuis le siège, le personnel en charge de la mise à disposition du matériel nécessaire pour effectuer les soins. Ces unités délèguent les missions de soins aux infirmières libérales et aux médecins traitants.
Cependant on oublie souvent plusieurs points :
- Le fait que les chevilles ouvrières qui sont à l’écoute du malade sont les libéraux ou salariés d’autres structures (médecins, aides ménagères, et infirmières). Ils connaissent les conflits parentaux ou les secrets de famille, et savent régler les heurts survenant durant la prise en charge.
- Le fait que les différentes problématiques rencontrées par le patient ou sa famille sont, dans la majorité des cas, solutionnées par les libéraux.
- Le fait que, dans certains cas, le dialogue entre ces différents professionnels est difficile ou pas très courtois, notamment en ce qui concerne le recours à du matériel en inadéquation avec le problème vécu par le patient
Dans notre secteur, qui est éloigné de tout centre hospitalier, nous avons décidé avec les autres soignants (infirmiers, aides-soignants et aides ménagères) de prendre en charge les patients qui nécessitaient des soins complexes. En fait, l’expertise de ces professionnels qui ont décidé de manière informelle de travailler ensemble permet d’avoir une approche de qualité sur le soin, mais aussi empreinte d’un humanisme hors pair. De cette manière -ce qui n’est pas nécessairement compris par les confrères hospitaliers qui refusent de nous connaître- nous nous affranchissons du recours à une HAD.
Nous adoptons le même comportement avec certaines sociétés de prestation qui oublient qu’il est parfois utile de travailler avec les équipes de proximité, et n’ont aucune considération pour le pharmacien de proximité qui peut dépanner en cas de besoin urgent. Bien entendu, pour arriver à cette fin, il est important d’avoir une confiance mutuelle, et que chaque groupe de soignants connaisse de manière parfaite ses attributions, et son rôle.
Il faut que les structures d'hospitalisation à domicile soient régulièrement contrôlés
Par ailleurs, compte tenu de la volonté de l’exécutif de développer les CPTS (communauté professionnelle territoriale de santé), le regroupement des soignants afin d’assurer des soins « de qualité » est devenu une priorité pour de nombreuses aires géographiques. Dans ce contexte il est difficile d’intégrer, et d’accepter des structures qui ne connaissent pas nécessairement les réalités du terrain. D'autant que travailler avec de nombreux intervenants peut devenir une source de problèmes et de conflits.
Des ressources parfois indispensables
Cependant, travailler sans le concours des HAD ou de prestataires est parfois impossible pour plusieurs raisons. Certaines de ces unités ont des attributions que les libéraux ne peuvent avoir (cas par exemple de la nutrition parentérale qu’un praticien libéral ne peut plus gérer car ses « compétences » ont visiblement été jugées limitées dans ce domaine). Et puis, certains professionnels refusent de collaborer ou de s’investir car travailler chez un patient, en soins palliatifs, par exemple, est souvent chronophage et parfois très difficile sur un plan psychologique.
Aussi est-il néanmoins important de valoriser les actions des acteurs de l'HAD. Cependant, il me semble important que des contrôles de ces structures soient régulièrement effectués ; cela pour éviter des gabegies financières.
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