Depuis quelques semaines, il est possible de se faire dépister (pour ce faire il n’est pas nécessaire par ailleurs d’avoir une prescription médicale). Nombreux sont nos concitoyens qui n’hésitent pas à se faire tester ; cela conduisant à modifier les statistiques concernant le nombre de patients contaminés par ce virus. Cependant plusieurs questions se posent à ce sujet qui concerne avant tout la santé publique de notre pays :
1/Est-il raisonnable de ne tester qu’une frange de la population (celle qui est volontaire), alors que certains patients pouvant être positifs ont fait le choix de ne pas aller faire le test ?
n2/Le patient X peut-il se faire tester tous les jours car il lui semble qu’il présente un risque majeur (avis personnel) de contamination ?
3/Le fait de permettre aux patients de se poser la question d’un dépistage au moment qu’ils souhaitent, ne va-t-il pas conduire à encourager les hypochondriaques à demander de manière très régulière le test ?
4/Le praticien peut-il « interdire » à un patient de se faire dépister car il pense que la réalisation de ce dépistage chez ce dernier est inutile ?
5/Une telle pratique intensive ne va-t-elle pas avoir un coût supérieur par rapport au bénéfice engendré par ce prélèvement ?
6/Le plus souvent avant d’obtenir le résultat il faut attendre 48 à 72 heures, que doit faire le sujet ayant fait le dépistage ; doit-il s’isoler et demander un arrêt de travail (qui n’est pas nécessairement valable dans une telle circonstance) ? Quid de la position du médecin dans la situation d’une demande d’un arrêt de travail pas nécessairement bien motivé ?
7/Pourquoi ne pas avoir effectué le dépistage de la population au mois de mars ; période où le virus était actif mais surtout agressif vis-à-vis de populations vulnérables ?
8/Quid des conséquences de la Covid sur la santé des plus vulnérables ? Combien sont actuellement admis dans les services de réanimation alors que le nombre de sujets contaminés est important ?
En Espagne, il a été décidé d’effectuer un dépistage de tous les patients d’une zone déterminée ; cela pour éviter que des cas positifs passent au travers des mailles du dépistage, et viennent contaminer les autres personnes. Une telle pratique me semble la plus logique si nous souhaitons obtenir un impact fort pour éviter la propagation du virus.
Toutes ces questions nous montrent qu’une pandémie engendre souvent une précipitation (la France n’est pas la seule à être concernée par la précipitation) qui n’est pas nécessairement salutaire pour la prise en charge de décisions opportunes dans le domaine de la santé. Cependant il est parfois déplaisant d’accepter que des « experts » dans le domaine de la virologie (infectiologues, urgentistes, réanimateurs, généralistes même) interviennent dans les médias en donnant des avis parfois diamétralement opposés. Il me semble qu’il serait important de coordonner toutes « ces forces vives » qui souhaitent avoir la dragée haute chez les patients et les collègues en instruisant la population.
« Ne jamais confondre mouvement et action » Hemingway Ernest.
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