In fine, on finira par vacciner tout le monde. Mais avec quels retard et anarchie !
La situation associe : urgence vaccinale, nécessité de vaccination de masse, contraintes techniques et temporo-spatiales inhabituelles peut-être excessives mais imposées, pénurie relative de vaccins. Ceci avec l’exigence de ne pas désorganiser les autres soins. Si « tout raisonner covid » est économiquement, socialement, sociétalement aberrant, ce l’est aussi sanitairement.
Nous ne pouvons raisonner avec les mêmes bases qu’habituellement car nous sommes dans une situation qui modifie l’ensemble des données y compris corporatistes. Mais on voit bien qu’au nom de la Covid, chaque individu, chaque corporation, chaque politique, chaque idéologie tentent de placer ses billes… de façon indécente pour certains.
Ainsi, il est légitime que Sanofi mette ses usines à disposition de son concurrent. Il est normal que les pays riches fournissent aux pays pauvres les vaccins car on est interdépendant pour stopper l’épidémie. De même, cette situation exceptionnelle nécessite coordination, centralisation, mutualisation des moyens et des parcours de vaccination.
L’efficacité, c’est tout centraliser sur des centres de vaccination et non d’éparpiller et de multiplier les vaccinateurs source de gaspillage, d’incohérence, de concurrence délétère, de perte de temps soignant pour les autres soins.
L’efficacité passe par la territorialisation : à un lieu de résidence du patient ne doit correspondre qu’un seul centre possible clairement identifié et impossibilité de s’inscrire ailleurs. L’accès ne doit être que sur rendez-vous avec, pour chaque centre, un seul numéro de téléphone et accès internet connu du public.
L’efficacité passe par le chacun dans son rôle : Secrétaire : gère les rendez-vous, enregistre les actes, établi les documents administratifs. Pharmacien : commande, amène les vaccins et s’assure des conditions de sécurité de conservation. Médecin : établi l’éligibilité et la non contre-indication ou précautions à prendre et intervient si problème secondaire. Infirmier : prépare le vaccin et injecte et surveille le post injection.
L’efficacité passe par une pertinence logistique et administrative : ARS, cpam doivent fournir, pour chaque centre, le nombre de patients relevant de la vaccination selon les critères établis de priorité. Ils doivent indiquer à chaque centre la capacité de vaccins dont ils peuvent disposer, tenant compte du nombre de patients éligibles et de vaccins produits. Faute de ces données, rien n’est organisable avec efficience. Ils doivent communiquer à la population les critères précis d’éligibilité de façon non vague du genre « si vous avez de la tension, un cancer vous êtes éligible ». Le paiement au forfait des intervenants, l’inutilité d’une CPS, est le plus simple permettant de faire intervenir soignants salariés, libéraux, en formation, retraités.
La priorisation des éligibles est justifiée du fait de la pénurie relative de vaccins. Seul le médecin généraliste traitant a toutes les données pour faire une réelle priorisation. En fait, ce concept de priorisation est de plus en plus inopérationnel et non respecté. La multiplication des vaccinateurs qui ne disposent pas des informations pour le faire, la grande variété possible d’interprétation des critères de risques, rendent probablement la priorisation caduque de fait, même si justifiée.
Il reste les patients intransportables ou dans des communautés particulières qui relèvent d’une organisation spécifique de vaccination à domicile qui ne saurait être de convenance car on ne peut gaspiller les forces soignantes.
Il nous a manqué un certain supplément d’âme et une vision cohérente et pragmatique des choses pour réaliser l’objectif : que tous soient vaccinés sans délai.
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