Le torchon brûle entre les médecins, les biologistes et les pharmaciens italiens. À l’origine de cette dispute : le renouvellement fin décembre de l’accord collectif national entre les pharmacies et le Service national de Santé (SSN). Cette convention autorise les quelque 20 000 officines dont 1 700 pharmacies communales appartenant à des entreprises publiques régionales ou locales disséminées sur l’ensemble du territoire à vacciner la population, réaliser des prestations de santé comme les tests sur sang capillaire ou les tests diagnostiques avec prélèvement de matériel biologique et organiser des téléconsultations. L’accord prévoit également d’uniformiser les modalités de dispensation des actes en officine sur l’ensemble du territoire.
Crainte sur la fiabilité des résultats
Pour les institutions italiennes, le renouvellement de l’accord collectif garantit un meilleur accès aux soins sur le territoire et la possibilité d’éviter les ruptures de parcours en permettant aux pharmaciens de contribuer à la santé globale de la population. En revanche, ce n’est pas tout à fait l’avis des syndicats de médecins et des biologistes qui évoquent le manque de fiabilité des résultats et la qualité des actes proposés aux patients. Ils contestent en particulier la possibilité de réaliser des examens cliniques plus complexes qui prévoient par exemple des prélèvements sanguins en officine.
« Cet accord remet en question la qualité et la fiabilité des services, il représente aussi une intrusion grave et évidente dans le champ de compétences des médecins sans parler de l’augmentation inacceptable des dépenses de santé alors que le manque de ressources pénalise la réalisation d’actes médicaux essentiels » estime le Dr Pierino Di Silverio, secrétaire national de Anaao-Assomed, le syndicat des médecins et des managers publics de santé du secteur hospitalier. Ce syndicat qui compte plus de 30 000 adhérents souligne aussi l’importance des implications médico-légales significatives qui caractérisent les procédures diagnostiques lorsqu’elles ne sont pas encadrées et intégrées dans les protocoles cliniques.
Les biologistes « atterrés »
Du côté des biologistes, la Fédération des ordres des biologistes (Fnob) s’agite également et se dit « atterrée » par le fait que les pharmaciens puissent signer des rapports d’analyses, ce qui laisse entendre que les équipements en pharmacie seraient identiques à ceux des laboratoires. Le Dr Vincenzo D’Anna, président de la Fnob, a dénoncé le fait que les examens sur sang capillaire pouvant être réalisés en officine ne sont pas équivalents aux prélèvements de sang veineux fondamentaux pour établir des diagnostics. « L’interprétation des examens de laboratoire ne peut pas être confiée à un pharmacien sans que soit garanti le respect des exigences structurelles, organisationnelles, technologiques et professionnelles spécifiques aux laboratoires accrédités par le service national de santé (SSN) » s’agace la Dr Patrizia Russo, médecin pathologiste.
De l’autre côté de la barrière, les pharmaciens évoquent un probable malentendu tout en parlant de « continuité thérapeutique » grâce au support professionnel des officines. Ils affirment que l’accord ne leur permet pas de réaliser des activités de diagnostic, mais plutôt de réglementer le champ de compétences des pharmaciens sur la base des indications du ministère de la Santé et des normes en vigueur. « Grâce à une présence sur le territoire et une relation de confiance avec le patient, le réseau des pharmacies représente une structure de proximité indispensable pour la collectivité et le Service national de santé » note Andrea Mandelli, président de la Fédération des ordres des pharmaciens italiens (FOFI).