Courrier des lecteurs

Recertification : la fausse bonne idée !

Publié le 20/05/2019

Il y a bientôt une année, en assemblée générale, le président Bouet nous informait de son désir de promouvoir une nouvelle forme de DPC. Il souhaitait ainsi vérifier que les connaissances scientifiques des praticiens de terrain demeuraient au plus haut niveau quel que soit leur avancement dans leur carrière. Estimant que la formation continue actuelle était insuffisante, il proposait un entretien du praticien tous les cinq ans avec des experts habilités à apprécier leur niveau de connaissance. Il était alors précisé que, pour le cas ou le praticien au cours de cet entretien révélerait des lacunes, cette circonstance impliquerait un retard à son accréditation mais ne l’empêcherait pas pourtant de continuer à exercer.

Le conseil national désirant associer l’université et ses enseignants à cette entreprise a confié au professeur Serge Uzan le soin de mettre en forme ce projet. Lequel ne fait plus mention d’un entretien mais bel et bien d’un examen, construit sur cinq critères d’évaluation. Un de ces chapitres me semble mériter un développement car il s’inscrit dans le domaine très subjectif du comportement du médecin par rapport aux patients (?)

Et si le dossier du praticien présenté au bout de six ans est jugé insuffisant ? Le professeur Uzan répond que le médecin qui ne validera pas la recertification n’aura pas le droit d’exercer ! Ceci est en contradiction avec les déclarations antérieures du président Bouet.

Quoi qu’il en soit, le projet tel qu'il nous est présenté pose de nombreuses questions actuellement sans réponse. En effet les modalités pratiques d’application de ce projet ne nous paraissent pas clairement. Qui seront les experts désignés pour apprécier le niveau de connaissance de leurs confrères ? Les critères d’appréciation varieront-ils avec les spécialités des praticiens ? Quelles formations (Où ? Quand ? Comment ?) devront suivre les praticiens défaillants pour récupérer leur accréditation. Faudra-t-il vraiment que chaque praticien consacre 15 à 30 jours par an à sa formation ? Cela semble déraisonnable pour un praticien de terrain (et ne peut avoir été imaginé que par un universitaire dont la pratique prévoit un temps de recherche).

Pourquoi a-t-on jugé insuffisant le DPC tel qu’il avait été prévu (article R4 1127–II du CSP, créé en 2009 et rendu obligatoire le 1er janvier 2012) ? Parce que l’Ordre des médecins qui devait vérifier tous les trois ans que chaque praticien avait fréquenté les réunions de formation continue, lu les revues médicales d’informations, passé les DIU afférents à leurs spécialités ne l'a pas fait. Aucun conseil départemental n'a jamais exigé de ses ressortissants des documents prouvant qu’ils avaient satisfait aux exigences de la formation continue ! Et pourtant, la majorité des médecins s’est pliée à ses exigences (j’ai, pour ma part, un plein carton de ces attestations que personne ne m’a jamais demandé et ne suis pas le seul dans ce cas).

On peut alors s’interroger sur l’avenir d’un dispositif très compliqué à mettre en œuvre, quand le dispositif simple qui aurait dû le précéder n’a jamais été appliqué par ceux qui en avaient la charge. Pourquoi donc remplacer une organisation qui permettrait aux praticiens d’organiser et de choisir librement le mode de l’entretien de leurs connaissances, par un système contraignant et imposé.

Il nous reste pourtant un espoir, que le nouveau système imposé subisse le sort de son prédécesseur pourtant simple : l’oubli !

Vous souhaitez vous aussi commenter l'actualité de votre profession dans le « Quotidien du Médecin » ? Adressez vos contributions à jean.paillard@lequotidiendumedecin.fr .

Dr Jean-Alain Cacault, Gynécologue, Asnières-sur-Seine (92), Membre du CROM Ile-de-France, Président de la Chambre Syndicale des Médecins des Hauts-de-Seine

Source : Le Quotidien du médecin: 9751