LE QUOTIDIEN : Vous avez choisi le thème de la médecine 2.0. Quels sont les enjeux de ce congrès ?
Camille TRICART : La médecine générale est en pleine mutation. La révolution numérique ne va pas arriver, elle est en cours. Il y a déjà une refonte de la relation patient/médecin. Les patients ont accès à un très grand nombre d'informations et le généraliste doit apporter des réponses personnalisées. Aujourd’hui on nous impose les nouvelles technologies alors qu'il faudrait accompagner cette révolution numérique et nous l'enseigner dès la formation initiale pour mieux nous préparer ! Si ces outils – applis, objets connectés… – sont bien utilisés, ils nous aideront à libérer du temps médical.
Quel est l'état des lieux de la médecine générale ? Comment voyez-vous l'exercice futur ?
Nous sommes favorables à un exercice mixte avec des études tournées vers le projet professionnel. C'est la tendance chez les jeunes. Ils sont attirés par cet exercice hybride ville/hôpital. Il y a un côté rassurant à l'hôpital parce que nous y avons été formés pendant toutes nos études contrairement au libéral.
Les attentes des jeunes médecins ont changé. Nous préférons la qualité à la quantité : la qualité de vie, avec une vraie différenciation entre le temps de travail et le temps personnel ; la qualité de soins avec la possibilité d'offrir de meilleurs services aux patients notamment grâce aux rémunérations forfaitaires ; la qualité des connaissances enfin via une formation initiale mieux construite et un développement professionnel continu exigeant.
Benoît Hamon et Manuel Valls, les finalistes de la primaire à gauche, souhaitent tous les deux contraindre l'installation des médecins. Ce sujet vous préoccupe-t-il ?
Nous sommes inquiets. Nous avons déjà combattu le conventionnement sélectif des médecins libéraux dans les zones surdotées proposé par la députée socialiste Annie Le Houérou, et également l'installation forcée pendant trois ans des jeunes diplômés dans une zone sous-dotée, proposition du député centriste Philippe Vigier. À l’époque, nous nous étions félicités de l'écoute et du rejet de ces textes.
Il faut promouvoir toutes les mesures incitatives qui ont fait leurs preuves. C'est le cas en Aveyron où le conseil départemental a mis en place une campagne intensive pour recruter des maîtres de stage, une aide financière à l'hébergement des internes, des logements à disposition et surtout un accompagnement personnalisé à l'installation prenant en compte le projet professionnel, de vie ou le rapprochement du conjoint. Ces mesures ont inversé la courbe d'installation et réussi à rendre attractif ce territoire ! Aujourd'hui, 37 internes ont émis le souhait de rester et de s'installer dans ce département. Le nombre de MSU est passé de 11 à 56 en dix ans. Nous savons que la situation sera tendue dans les dix prochaines années mais elle va s'améliorer à l'horizon 2025 avec l'augmentation du numerus clausus.
L'ISNAR s'exprimera sur ce sujet le 15 mars lors de la convention sur l'accès aux soins organisée par les structures jeunes (ANEMF, SNJMG, ISNCCA, ReAGJIR) afin d'échanger avec les candidats à l'élection présidentielle.
Quels sont les combats à mener en 2017 ?
La priorité sera l'accès aux soins de premier recours dans tous les territoires. La bonne mise en place de la réforme du troisième cycle constitue un autre objectif. On continuera à se battre pour que la voix des internes soit mieux entendue. Il faut leur garantir une formation de qualité et cela passe obligatoirement par une augmentation des effectifs des maîtres de stage des Universités (MSU) et leur revalorisation salariale.
Un chantier tout aussi important est la lutte contre la souffrance des internes au travail. Une enquête commune avec les autres structures jeunes (ANEMF, ISNI et ISNCCA) est en cours. Enfin, la réforme du temps de travail des internes doit être appliquée. Nous voulons obliger les hôpitaux à respecter la législation et, dans le cas contraire, nous réclamerons des sanctions financières.
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