LES ANNULATIONS d’examen de médecine pour une absence de brouillon ou la perte d’une copie seront-elles bientôt un vilain souvenir ? Une commission pédagogique travaille activement à la mise en place des épreuves classantes nationales (ECN) informatisées en 2016. « Nous sommes dans les clous », assure le Pr Dominique Perrotin, président de la conférence des doyens. Un enseignant et un étudiant de chaque faculté ont assisté à la présentation de ce que pourraient être les iECN, lors d’une réunion à Paris.
Dossiers cliniques sur clé USB
Sur le papier, le principe est simple. « Tous les étudiants disposeront d’une tablette sans lien à un réseau, explique le Pr Perrotin. Une clé USB sera remise aux candidats qui contiendra les dossiers cliniques ».
Aux oubliettes les copies papiers. Les ECN dématérialisées et informatisées permettront de répondre à des QCM (questionnaires à choix multiples), des QROC (questions à réponse ouverte et courte), des tests de concordance de script ou encore des dossiers progressifs. Ces derniers offrent la possibilité aux candidats de découvrir de nouveaux éléments de diagnostic (radios, ECG, vidéo...) au fil des questions.
« Ce système est le plus simple et nous met à l’abri des problèmes », veut croire le doyen Perrotin. Outre l’usage facile de la tablette, la correction automatisée des épreuves est instantanée et nécessite peu d’intervention humaine.
À terme, les iECN devraient générer des économies - le poste de la correction a représenté 1,25 million d’euro sur les 3,6 millions d’euros qu’ont coûté les ECN en 2011. « Dans les facultés, nous allons essayer d’organiser des examens sur tablettes dès l’an prochain, annonce le Pr Perrotin. Cela va nécessiter un investissement important pour les universités. »
À titre d’exemple, la faculté de Grenoble a acheté 200 tablettes pour un budget de 100 000 euros environ. Ce montant pourrait poser problème aux universités qui connaissent des difficultés financières comme Angers.
Il faudra s’entraîner aux iECN
Le train de l’informatisation en santé semble en marche. Et la faculté de médecine de Grenoble en est la locomotive. Après avoir mis en place il y a quelques années le e-learning, sous la direction du doyen de l’époque Bernard Sèle, Grenoble a conçu SIDES, un système informatique distribué d’évaluation en santé. C’est à partir de cette plateforme, que tous les étudiants pourront s’entraîner aux iECN et que les enseignants pourront se former.
En théorie, SIDES devrait être accessible dans toutes les facultés de médecine à compter de septembre 2013. « Notre volonté est d’aller vite et d’organiser dès l’année prochaine des examens facultaires informatisés », explique son concepteur, le Pr Olivier Palombi, neurochirurgien et enseignant d’anatomie.
L’universitaire grenoblois voit beaucoup d’avantages à l’informatisation des examens ; plus particulièrement pour classer les candidats. Les ECN ont en effet montré leurs limites. En 2012, elles ont classé 7 658 candidats en 350 points (sur un total de 1 000) ! Les coûts de développement et de maintenance de SIDES (estimés à 500 000 euros) devront toutefois trouver un financeur. « Nous espérons une mobilisation des ministères de la Santé et de l’Enseignement supérieur », avance Olivier Palombi.
Y a-t-il un plan B ?
L’Association nationale des étudiants en médecine de France (ANEMF) est favorable aux ECN informatisées à compter de 2016. Elle veut toutefois que tous les étudiants disposent de la même préparation et que des iECN blanches soient réalisées en conditions réelles avant 2016.
Pour Jordane Chaix, vice-président de l’ANEMF en charge des études médicales, le « frein majeur » au succès de cette réforme sera l’implication et la formation des...4 300 enseignants à ce nouvel outil. Les étudiants demandent qu’un plan B soit prévu en cas de dysfonctionnement des iECN. Chat échaudé...
La réussite de l’entreprise reposera également sur une bonne information de toutes les facultés. Quelque 36 comités locaux vont être mis en place rassemblant un étudiant et un enseignant chargés de relayer auprès de leur faculté l’avancée des travaux de la commission pédagogique qui se réunit une fois par mois.
« C’est un très beau projet, on y croit mais les facultés ne sont pas prêtes du tout, met en garde Matthieu Levaillant, porte-parole de l’ANEMF. Tous les comités locaux ne sont pas constitués. Il faut s’y mettre dans toutes les villes, cela va demander un travail colossal. »
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