Plusieurs associations de médecins libéraux, comme l'UFML, le patron de la Fédération des médecins de France (FMF) ou les Ainsoumis, un mouvement asyndiqué de praticiens de l'Ain qui lutte contre la loi Touraine, sont remontés à bloc contre le candidat de la France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, et ses responsables santé.
Le collectif des Ainsoumis a publié sur sa page Facebook, ainsi que sur Youtube, une série de vidéos, tirées d'une entrevue filmée en octobre dernier entre Jean-Luc Mélenchon, son porte-parole santé, le sociologue Frédéric Pierru, et le Dr Irène Frachon, pneumologue et lanceuse d'alerte de l'affaire Mediator.
Ils y discutent du programme santé du candidat à l'élection présidentielle, et notamment du suicide des soignants, de la représentation des médecins libéraux ou encore des études médicales.
Dans l'un de ces extraits, Frédéric Pierru évoque ainsi le « système pervers » de la représentation des médecins avec des syndicats de médecine de ville « très faibles » qui « pratiquent la surenchère » et compare les spécialistes à des « machines à sous ».
« Avant goût du communisme »
Il n'en fallait pas plus pour déclencher l'hystérie sur les réseaux sociaux. Le Dr Jérôme Marty, président de l'UFML, a réagi dans une série de tweets en des termes très crus.
"Les machine à sous" voila comment Pierru appelle les médecins, et CET ABRUTIS conseille @JLMelenchon https://t.co/PuVyb6FoV9
— DrMartyUFML (@Drmartyufml) April 13, 2017
D'autres extraits des vidéos sont également repris dans d'autres tweets.
Pour Pierru les syndicats médicaux sont responsables du malaise des professionnels de santé...Mais ferme ta bouche! https://t.co/UY2aFTB6Qx
— DrMartyUFML (@Drmartyufml) 13 avril 2017
Le collectif des Ainsoumis, de son côté, se dit « ébahi par les dires de notre consœur [le Dr Irène Frachon N.D.L.R.], qui, bien qu'elle ait récemment prétendu ne pas faire de politique et ne soutenir personne, participait ainsi à l'élaboration du programme santé que Mélenchon a prévu ». La pneumologue a assimilé les spécialistes à des « tiroirs-caisses » lorsqu'ils reçoivent des patients en ALD qui pourraient être pris en charge par leur médecin traitant. « Il faut arrêter que certaines spécialités soient un super jackpot », poursuit la Brestoise, citant les cardiologues dont certains, exerçant en clinique peuvent selon elle toucher jusqu'à « 70 000 euros par mois ».
Le collectif reproche au Dr Frachon son « manque de confraternité », « un redoutable et injuste jugement envers toute une profession », et y voit « un avant (arrière) goût des heures sombres du communisme ».
Le candidat de la France insoumise, qui a fortement percé dans les sondages ces derniers jours, semble inquiéter la profession. Mais Jean-Luc Mélenchon craint lui aussi la réaction des médecins libéraux s'il venait à appliquer son programme (il défend le développement de la médecine salariée). « Quand on arrive au pouvoir, avec qui on parle ? », demande-t-il, très convaincu, à Frédéric Pierru.
« Oui au débat, non à l'injure ! »
Contacté sans succès jeudi par « le Quotidien », Frédéric Pierru a pu être joint ce vendredi matin*.
Il regrette la « virulence de certains porte-parole de la profession ». « Même si nous sommes dans le cadre d'une campagne, on n'injurie pas les gens », réplique le sociologue, qui appelle à un débat apaisé. « Je suis évidemment pour que les professionnels de santé gagnent correctement leur vie, assure-t-il. Je pointais seulement du doigt les très fortes inégalités de revenus entre les disciplines médicales. » La France Insoumise souhaite poser le problème de la juste rémunération de toutes les spécialités. « Cela me semble un sujet tout à fait légitime tant du point des inégalités d’accès aux soins que de la régulation de la démographie des professions de santé », précise le conseiller santé de Jean-Luc Mélenchon qui assure ne pas avoir dit que les spécialistes étaient des « machines à sous ». « Ce serait un propos absurde, explique-t-il. J’ai seulement dit que certaines spécialités techniques, comme la radiologie, bénéficiaient de "rentes de situation", ce qui est un secret de Polichinelle dans la profession. »
Le sociologue assume ses propos sur la représentation syndicale des médecins libéraux éclatée et ses conséquences sur les politiques publiques qui a selon lui été bien analysée par les travaux de sciences politiques. « Ce n’est pas un jugement mais un fait établi, poursuit-il. Les médecins le savent bien puisque très souvent la base s’en prend à ses syndicats et souvent dans des termes peu amènes. »
Le représentant de la France Insoumise regrette la tournure des événements, les vidéos relayées sur les réseaux sociaux datant d'octobre lors d'auditions programmatiques de Jean-Luc Mélenchon.
« La France Insoumise souhaite évidemment dialoguer avec les porte-parole des médecins mais dans le respect mutuel et avec comme priorités l’égalité d’accès aux soins de toutes et tous d’une part, la rémunération équitable de toutes les spécialités d’autre part », conclut Frédéric Pierru.
* Article mis à jour le 14 avril à 10h00.
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