Déserts médicaux : davantage que des primes, les internes veulent être accompagnés dans leur projet d'installation et de vie

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Publié le 14/02/2022

Crédit photo : PHANIE

Avis aux maires et aux présidents de communauté de communes en mal de médecins : l’incitation financière à l’installation ne fait pas tout ! Beaucoup d'autres facteurs entrent en ligne de compte, a montré une table ronde du forum des jeunes médecins d'Occitanie, organisée à Montpellier samedi 12 février. En commençant par l'origine géographique des carabins, qui a son importance. « Les internes qui s’installent dans des zones en tension le font d’abord parce qu’ils y ont grandi », a cadré la Dr Mathilde Minet, médecin généraliste installée dans le département le moins densément peuplé de France, la Lozère.

Dès lors, comment attirer les jeunes généralistes et les médecins d'autres spécialités vers les déserts médicaux ? C’est la question qui était posée par le Syndicat et l’Union des internes du Languedoc-Roussillon (SILR et UNILR).

L'ARS et la fac, fonctions support 

Le Dr Yassin Uezagti, jeune généraliste souhaitant s’installer dans un quartier en pénurie de soignants, à Perpignan, a plaidé pour une meilleure coordination entre l'administration, les internes et la faculté. Il propose une mesure concrète et a priori réalisable. « Pourquoi l’ARS et la fac n’informeraient-elles pas les internes sur les situations où des médecins vont partir en retraite dans un lieu qui peut correspondre à leur projet de vie ? », interroge-t-il. 

Sans renier l’importance des aides financières accordées par les petites communes, c’est sur la qualité de vie offerte dans ces territoires que les jeunes médecins ont insisté. C'est une politique globale d'aménagement et d'équipement des zones rurales qui est souhaitée. Et pas question de subir des mesures punitives, qui risquent de décourager. « La coercition, no pasaran ! », lance même le Dr Uezagti en réponse aux propositions directives de plusieurs candidats à l'élection présidentielle. 

Le CESP très intéressant mais...

Reste que les promesses d’accompagnement, quand elles existent, ne sont pas toujours suivies d’effet. « J’ai été attirée par le contrat d’engagement de service public* proposé par l’ARS, que je conseille d’ailleurs à tout le monde, a témoigné la Dr Karine Mathon, 30 ans, diplômée de la fac de médecine de Nantes, qui a quitté l’Ouest pour les Pyrénées-Orientales. C’est extrêmement intéressant financièrement pour qui veut s’installer en milieu rural mais j’attends toujours l'accompagnement social et de formation de l’ARS », glisse-t-elle devant l’un de ses représentants. 

Cet accompagnement, doublé d’un souci de préparation très en amont du projet professionnel, la région Occitanie semble l’entendre. « J’espère que les élus locaux ont bien compris que ce n’est pas en construisant une maison de santé qu’on attire des médecins », alerte le Pr Vincent Bounes, vice-président de la région en charge de la santé. De fait, nombre d'élus se sont retrouvés avec des coquilles vides, faute de projet médical bien construit et partagé.  

Dès le lycée ? 

Pour faire naître des vocations médicales, la région Occitanie vient de mettre en place une option santé (facultative) dès le lycée, en classe de première et terminale. Elle consiste en trois heures de cours hebdomadaires. « Seuls deux lycées l’ont mise en place à ce jour mais l’idée est de proposer des cours qui sensibilisent aux métiers de la santé, permettent de préparer la filière santé et surtout de rencontrer des personnels de santé, explique le Pr Vincent Bounes, qui est aussi directeur du Samu 31. Des lycéens viendront d'ailleurs bientôt visiter mon service. Nombre d’aspirants à nos professions, infirmiers ou médecins, arrêtent leur formation en cours de route car ils méconnaissent le métier avant de vouloir le pratiquer. »

Et en phase post-bac, la collectivité régionale – qui met par ailleurs en place une politique d'embauche directe de médecins salariés – veut instaurer une bourse de mobilité permettant aux internes, en stage hors de leur ville universitaire, de se loger et d’effectuer leurs déplacements à des frais limités. « La Région dispose de locaux qui peuvent permettre aux internes de suivre des cours en distanciel pendant leur stage, quand il a, par exemple, lieu dans un centre hospitalier », précise le médecin qui promet aussi de rénover et d'agrandir les internats « pour mieux accueillir nos futurs confrères ». 

* Le CESP propose aux étudiants et aux internes en médecine une allocation mensuelle de 1 200 €. En échange, ces derniers s’engagent — pendant un nombre d’années égal à celui durant lequel ils auront perçu l’allocation et pour 2 ans minimum — à s’installer dans une zone où la continuité des soins est menacée. 


Source : lequotidiendumedecin.fr