Que faut-il espérer de la future loi de santé, qui sera examinée par les sénateurs en séance publique à partir du 3 juin ? Lors d'une table ronde à la Paris Healthcare Week (PHW) réunissant les représentants des étudiants en santé (médecine, pharmacie, infirmiers et directeurs d'hôpitaux), les jeunes ont cadré leurs attentes (exercice collégial interprofessionnel, approche gain de temps de soin, virage de la prévention...) mais aussi leurs craintes de la coercition.
Alors que des querelles de frontières sont ravivées entre les métiers (médecins, officinaux, paramédicaux), les jeunes semblent beaucoup plus ouverts que leurs aînés à de nouvelles répartitions des tâches, sous réserve qu'elles soient encadrées. Interrogés sur la dispensation par les pharmaciens de certains médicaments sous protocole, une proposition très controversée, les juniors n'ont pas fermé la porte. « Les compétences des professionnels de santé, qui se recoupent, doivent être utilisées au mieux pour libérer du temps médical. La dispensation sous protocole permet d'éviter au patient une consultation médicale, mais elle doit être adaptée territorialement », résume Pierre Guillet, premier vice-président de l'Intersyndicale des internes en médecine générale (ISNAR-IMG). « Il y a beaucoup de pédagogie à faire auprès de nos seniors concernant la dispensation sous protocole, complète Antoine Reydellet, président de l'Intersyndicale nationale des internes (ISNI). Il y a eu beaucoup de fake news sur ce sujet ! »
De même sur la vaccination antigrippale en officine, le président de la Fédération nationale des étudiants en soins infirmiers (FNESI), Bilal Latrèche, s'est montré favorable. « Les positions sont très tranchées sur la question, mais ce qu'il faut avant tout se demander c'est : quels sont les besoins du patient ? À partir du moment où l'environnement est sécurisé, alors c'est bon ! », souligne-t-il.
Plus de management bienveillant
Concernant la réforme des études médicales, le bien-être lors de la formation est un sujet prioritaire. « On manque de temps à l'hôpital, tout le monde court tout le temps ! Il faut développer un système autour de l'échange et du débriefing : le chef de clinique avec l'interne et l'interne avec l'externe, insiste Clara Bonnavion, présidente de l'Association nationale des étudiants en médecine (ANEMF). Il faut remettre de l'humanité dans notre formation pour faire remonter le niveau de bien être chez les étudiants. » Pour le président de l'ISNI, ce manque de formation en management pour les internes fait « cruellement défaut ». « S'il y a autant de places vacantes dans les hôpitaux, ce n'est pas que les internes se cachent à la fin de leurs études… On a demandé aux structures de santé d'être rentables en oubliant que, derrière, il y avait des humains ! », constate Antoine Reydellet.
La place accrue accordée à la prévention est également un objectif partagé, estime l'ANEMF. « Les médecins n'y sont pas vraiment formés, contrairement aux infirmiers par exemple. D'où le service sanitaire et la réforme des études de santé », salue Clara Bonnavion.
Le poison de la coercition
Quant aux mesures contraignantes, réclamées par une partie des députés et aujourd'hui des sénateurs pour répartir l'offre médicale (conventionnement sélectif, stages obligatoires en zone sous-dense), elles sont rejetées par les futurs médecins. « Ce n'est pas une solution face aux déserts médicaux ; en revanche, les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) et les 400 médecins à exercice partagé en sont une, plaide Pierre Guillet. De même, les assistants médicaux feront gagner du temps médical pour voir plus de patients, ou prendre plus de temps. »
Attention à ne pas faire fuir les jeunes médecins, prévient Antoine Reydellet (ISNiI. « Si on fait une politique d'installation trop restrictive en France, ils iront ailleurs, conclut le jeune interne en médecine du travail. Nous ne sommes pas le seul pays qui manque de médecins ! »
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