L’ajout d’une année à l’internat de médecine générale n’est pas un débat nouveau mais il agite toujours la spécialité. Alors que les enseignants, à travers le Collège national des généralistes enseignants (CNGE) appelle depuis un moment à un allongement du DES, les internes de médecine générale, représentés par l’Isnar-IMG s’y sont longtemps opposés.
Depuis quelques années les positions semblent cependant évoluer légèrement. En 2018, le conseil d’administration de l’Isnar-IMG se prononçait en faveur du principe d’un internat en 4 ans sous certaines conditions. Mais en janvier de cette année, voyant le dossier s’accélérer et en désaccord avec le projet avancé par le CNGE, il s’y opposait. Finalement les discussions ont continué, et les internes sont restés autour de la table pour faire des propositions concrètes de maquette.
Améliorer la formation
Le thème de la phase de consolidation était au menu de la plénière de jeudi après-midi au 20e Congrès du CNGE. Aujourd’hui, il ne fait plus de doute que cet allongement de la maquette se fera, à plus ou moins long terme. Étudiants et enseignants ont donc décidé d’essayer de trouver un terrain d’entente sur le futur projet. « Il faut lever tout malentendu. Nous ne voulons pas avancer tout seul dans notre coin, mais avec les internes », a rappelé le président du CNGE le Pr Olivier Saint-Lary. Et comme il l’a souligné l’enjeu central est « avant tout d’améliorer la formation des internes ». « Nous avons besoin d’un temps plus long. Aujourd’hui il ne permet pas d’intégrer des savoir-faire plus professionnels », juge le Pr Laurence Compagnon. Longtemps suspecté de vouloir cette 4e année pour des raisons de fierté face aux autres spécialités, le CNGE veut sortir de ces clichés. « Il y a effectivement un enjeu disciplinaire, mais pas pour dire qui est le plus fort entre spécialités. C’est une question de reconnaissance de la spécificité de notre discipline. Il est étonnant que l’on n’exige pas d’un généraliste qu’il passe un temps donné dans son champ disciplinaire propre, comme on le fait pour les autres spécialités », explique le Pr Saint-Lary.
Retour du stage libre
Concrètement, cet allongement d’une année permettrait aux internes de récupérer de la souplesse sur la phase d’approfondissement (2e et 3e année d’internat) par rapport à une maquette qui est aujourd’hui considérée comme trop rigide par les étudiants. « Elle ne laisse pas de place au projet professionnel », explique Morgan Caillault, président de l’Isnar-IMG. Sur le contour de cette potentielle future phase d’approfondissement, l’Isnar-IMG comme l’Anemf proposent donc de coupler à nouveau le stage femme et enfant (3 mois/3 mois), que le semestre en médecine adulte polyvalente soit en majorité « teinté » gériatrie, le Saspas (stage en autonomie supervisée) est évidemment maintenu obligatoire en ambulatoire et cette nouvelle configuration permettrait le retour du stage libre sur un semestre. Une demande de longue date des étudiants. Sur la phase d’approfondissement, étudiants et enseignants semblent avoir trouvé un point d’accord. « Nous commençons à trouver un consensus », confirme Jeanne Dupont Deguine, vice-présidente de l’Anemf. « Il y a de la place pour cette liberté si nous sommes en quatre ans », ajoute le Pr Saint-Lary.
Un statut de Dr Junior ambulatoire pour la 4e année
Mais au-delà des trois premières années, la question du contenu de cette fameuse phase de consolidation en quatrième année n’est pas encore tranchée. Même si de son côté, l’Isnar-IMG a une idée précise de comment elle doit se dérouler et toute une série de revendications qui l'accompagne. Le syndicat souhaite que cette année soit constituée d’une année de stage ambulatoire ou de deux fois six mois avec la possibilité de coupler ambulatoire et hospitalier. Elle doit se faire selon le projet professionnel de l’interne. Pour cette phase de consolidation, « il est indispensable qu’un statut de Dr Junior ambulatoire (DJA) soit créé et défini avant la mise en place de la réforme », estime Morgan Caillault, à l’image de ce qui a été fait avec le statut de Dr Junior hospitalier. L’Isnar-IMG rappelle que cette année de stage doit se faire auprès « d’un médecin collaborateur », avec lequel un contrat type sera mis en place. Mais les internes devront aussi être « séniorisés » par un maître de stage universitaire territorial, « pouvant se déplacer sur le terrain de stage en moins de vingt minutes ». Le projet du syndicat prévoit que la semaine se décompose autour de six demi-journées en stage et deux demi-journées dédiées au projet professionnel du DJA.
Au niveau rémunération, « elle doit être professionnalisante et pouvoir être à l’acte ou sous forme de salariat », détaille Morgan Caillault. Le DJA doit aussi pouvoir être éligible à la signature d’un Contrat de début d’exercice, qui permet le versement d’une rémunération minimum.
Éviter la coercition déguisée
Les représentants des IMG veulent aussi s’assurer que le DJA ne soit pas soumis à une contrainte géographique pour son lieu « d’exercice » lors de cette phase de consolidation. Car la crainte face à cette réforme est qu’elle ne réponde en fait qu’à un souci d'accès aux soins et prenne la forme d’une coercition déguisée. « J’ai peur que la démographie médicale l’emporte sur la formation des internes et que cette année soit en réalité un service sanitaire obligatoire », a ainsi exprimé le Dr Vincent Claudel. Le Pr Saint-Lary a tenu à rassurer sur ce point en réaffirmant que le CNGE serait toujours opposé à la coercition. « Cette quatrième année ne serait pas une coercition cachée. Nous sommes dans l’idée de faire confiance aux jeunes et de leur donner la chance de montrer qu’ils ont envie d’être utiles et d’aller là où on a besoin d’eux ». Le président du CNGE promet que les internes seront associés à la commission de répartition des internes et que le but est d’ouvrir des stages qui correspondent au projet professionnel.
Dans la salle, la réticence de plusieurs internes s’est aussi exprimée autour d’un « maintien plus longtemps dans un statut précaire ». En réponse, le CNGE affirme qu’il sera particulièrement vigilant sur la question de la sécurité du statut pour ces jeunes médecins et notamment sur la rémunération.
Des réponses en fin d'année ?
Si les discussions doivent encore aboutir sur la phase de consolidation, la question du calendrier reste entière et elle est surtout très dépendante de celle des moyens financiers. « Aujourd’hui, le dossier est entre les mains des tutelles. Il y a une difficulté financière mais le coût est à la portée des ministères compte-tenu de l’enjeu », considère le Pr Saint-Lary. Il espère que le sujet va avancer rapidement pour que des annonces officielles soient possibles lors du prochain Congrès du CNGE prévu en fin d’année à Lille.
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