À la suite d’un vote de la Société des chirurgiens des hôpitaux, les internes des hôpitaux de Paris ont été pris d’une certaine émotion. Ont-ils eu tort ? On va en juger.
Il s’agit, en l’espèce, de la question souvent agitée, mais jamais résolue d’une façon idéale - l’idéal n’est pas de ce monde – des opérations pratiquées dans les services hospitaliers par les internes eux-mêmes, sous leur propre responsabilité. La Société des chirurgiens, dans une récente séance, a simplement demandé à M. le Dr Napias, directeur de l’Assistance Publique, de faire respecter le règlement. Et c’est tout ! Évidemment, c’est peu. En théorie, du moins… Mais, en pratique, si on appliquait formellement ledit règlement, cela pourrait peut-être mener beaucoup plus loin ou, en tout cas, être très ennuyeux ou fort compliqué.
Réglementairement, en effet, il ne s’agit nullement d’empêcher nos collègues d’opérer à l’hôpital. On a voulu seulement « éviter des abus et établir des responsabilités ». Voilà qui est très bien. Mais, dans la réalité des choses et, surtout, en face de la teneur des articles 61, 127 et 130, on doit se demander si les restrictions formulées par le règlement ne sont pas un peu encombrantes et, surtout, inutiles.
D’après l’article 61, il faut une autorisation ÉCRITE du chef et la remise de cette autorisation au directeur. Or une telle formalité n’est qu’une paperasserie vaine ! De plus, avant d’opérer, l’interne doit prévenir le directeur. Pourquoi ? Je ne devine pas. Il devrait pouvoir le prévenir après ; ce serait plus logique…
De plus, l’article 127 repose tout entier sur le chirurgien de garde. S’il arrive avant, tout est bien. S’il n’arrive pas, l’interne n’a qu’à laisser mourir son patient dans les cas d’urgence.
O Administration, que de crimes on commet en ton nom ! Cela prouve que les gardes d’hôpital devraient être assurées non pas comme elles le sont aujourd’hui par un chirurgien en titre quelconque mais par des assistants de garde, présents effectivement à l’hôpital, à toute heure de nuit et de jour. Mais n’insistons pas. À revenir sur ce point, si souvent discuté en vain, ce serait retomber dans la question des Prompts Secours dans les grandes villes.
Les internes ne se sont donc peut-être pas, en pratique, émus tout à fait à tort, car tout directeur, le règlement en main, pourra quand il voudra, pour des raisons non médicales, influer sur leurs déterminations : ce qui est antiscientifique et, par suite, antisocial !
(La Chronique médicale, janvier 1901)
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