L'amélioration de la répartition des médecins libéraux sur le territoire a déjà fait dans le passé l'objet de nombreux plans.
La convention signée le 25 août dernier n'échappe pas à la règle. Elle prévoit pas moins de quatre nouvelles dispositions (voir ci-contre). Certaines sont nouvelles et ont une portée symbolique, comme l'aide de 50 000 euros versée par l'assurance-maladie pour les praticiens qui s'engagent à s'installer pendant cinq ans dans un désert. D'autres ne font qu'aménager des dispositions antérieures. Ces mesures conventionnelles viennent compléter le pacte territoire santé lancé en décembre 2012 par Marisol Touraine, et musclé l'an dernier.
En France, ce n'est pas le nombre de praticiens qui pose problème, mais leur très inégale répartition sur le territoire. Au 1er janvier 2016, selon les chiffres de l'Ordre, notre pays comptait 198 144 médecins en activité régulière, auxquels il faut ajouter 11 285 praticiens exerçant une activité intermittente, et 15 878 autres en cumul emploi retraite. Mais la densité médicale peut varier du simple au double d'une région à une autre. Et les différences peuvent être encore bien supérieures au niveau des bassins de vie.
Au-delà des questions de santé publique, la question d'une meilleure répartition des praticiens constitue aussi un enjeu politique : lors de son élection en 2012, le candidat François Hollande s'était engagé à ce qu'aucun Français ne se trouve, à la fin de son quinquennat, à plus d'une demi-heure d'une réponse médicale urgente.
Une volonté de bien faire
Chez les étudiants en médecine, premiers concernés, ces mesures inspirent des sentiments partagés. William Gens, vice-président de l'ANEMF, en charge des perspectives professionnelles, reconnaît qu'il y a « une volonté de bien faire » de la CNAM. Il rappelle toutefois que sur les quatre mesures, deux sont des adaptations de dispositions conventionnelles antérieures qui n'ont pas forcément rempli leurs objectifs (voir ci-contre).
L'ANEMF souligne que le montant versé aux médecins dans le cadre du contrat d'aide à l'installation (50 000 euros) est imposable, et sera donc en définitive en partie amputé par le fisc. William Gens émet des « réserves » sur la portée du dispositif : « Ce système n'est pas forcément la panacée. »
Paradoxalement, le ton est plus positif chez les Généralistes CSMF. Le Dr Luc Duquesnel, leur président, bien que non-signataire de la convention, reconnaît que « l'ensemble de ces mesures est plutôt structurant et complet ». Le praticien souligne notamment l'intérêt du contrat de transition pour les médecins et du contrat de solidarité territoriale qui « va intéresser d'autres spécialités que la médecine générale ». Mais ces quatre mesures ne vont pas régler seules la question. « Ca n'est jamais suffisant, conclut Luc Duquesnel, mais c'est un élément du puzzle ».
Des élus sceptiques
Les patients attendent aussi pour le nouvel arsenal anti-déserts. « Ces quatre contrats constituent un vrai signal avec des aides pour les jeunes qui s'installent en zone sous-dense, et pour ceux qui acceptent de continuer à y exercer » , analyse Christian Saout, secrétaire général délégué au Collectif interassociatif sur la santé (CISS). Leur succès n'est cependant pas garanti pour le représentant des usagers. « En réalité, ce dont ont le plus besoin les médecins dans ces zones sous-dotées, ce n'est pas de 50 000 euros en plus, mais des aides à l'exercice regroupé », croit-il savoir.
Du côté des élus locaux, ce dispositif laisse sceptique. Xavier Nicolas, maire de Senonches (Eure-et-Loir) et membre du bureau de l'Association des petites villes de France (APVF), rappelle que « des mesures incitatives, indépendamment de leur montant, existaient déjà et n'ont pas marché ». L'élu n'en reconnaît pas moins que « la rémunération du médecin libéral étant insuffisante, tout ce qui peut conforter ce mode d'exercice est une bonne chose ».
Pour lui, la solution passe, non pas par la coercition pure et dure, mais par une régulation conventionnelle similaire à celle acceptée les infirmiers (une installation pour un départ dans les zones denses). En cas d'échec, il recommande de passer par la voie législative.
Les offensives parlementaires se multiplient ces dernières années. Le député centriste d'Eure-et-Loir, Philippe Vigier, va proposer en octobre une troisième proposition de loi musclée visant à lutter contre les déserts médicaux. « Les incitations financières ont montré leurs limites, il faut réguler davantage l'installation », a-t-il confié. L'élu réclame la régionalisation des ECN et souhaite que les jeunes médecins soient tenus de choisir un poste et d'exercer pendant trois ans dans la région dans laquelle ils ont été formés.
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