GLOBALEMENT, LES cardiologues interventionnels sont assez peu confrontés à des patients qui refusent catégoriquement les soins qui leur sont proposés. « Dans notre spécialité, ces situations, exposant le patient à un risque vital, restent heureusement assez rares. Mais c’est un cas de figure qui peut se présenter et il est important de savoir comment alors réagir », souligne le Dr Cédric Gaultier.
« La majorité des actes de cardiologie interventionnelle se fait en dehors d’un contexte d’urgence. Cela laisse la possibilité de discuter “à froid“, en prenant le temps nécessaire pour exposer au patient la réalité de son état de santé et les différentes options thérapeutiques qui lui sont proposées », indique le Dr Gaultier, en ajoutant que le praticien ne doit pas renoncer trop vite devant un refus de soins. « Face à un patient qui exprime une inquiétude vis-à-vis d’un traitement, il faut prendre son temps pour lui réexpliquer la pathologie et l’intérêt de la prise en charge envisagée. Il ne faut, bien sûr, pas occulter les risques potentiels liés à l’intervention, mais surtout insister sur le fait que le rapport bénéfice/risque reste favorable ». Tous ces efforts pour convaincre le patient sont importants et ne doivent pas être négligés. Le praticien doit également être attentif à un éventuel sentiment de perte de confiance du patient vis-à-vis de lui-même. « Si le médecin a l’impression que le patient qui est en face de lui a perdu confiance, il ne doit pas hésiter à proposer un avis auprès d’un autre praticien ou de l’équipe médicale. Il peut avantageusement faire appel à une infirmière qui sera peut-être plus convaincante pour expliquer la situation au patient, en utilisant moins de jargon médical. Cela peut permettre de faire tomber une pression qui peut être importante dans ce contexte », indique le Dr Gaultier.
Un impératif de traçabilité.
Si, malgré ce travail d’explication, le patient persiste dans son refus de soins, le médecin doit alors passer à une deuxième phase. « On entre à ce moment dans une phase de défense et de protection du médecin qui doit tout faire pour prouver qu’il a fait tout ce qu’il pouvait pour convaincre le patient. Il y a un impératif de traçabilité avec la constitution de pièces écrites qui seront versées au dossier. Le cardiologue doit d’abord garder un exemplaire des ordonnances remises au patient. Il doit aussi lui adresser un courrier indiquant clairement que le diagnostic a mis en évidence, par exemple, des lésions coronaires sévères et que le traitement par angioplastie a été refusé alors que le patient a été, à plusieurs reprises, informé qu’il encourrait un risque vital sans ce traitement », souligne le Dr Gaultier. Le cardiologue interventionnel peut aussi s’appuyer sur les médecins traitants du patient, le cardiologue comme le généraliste. « Il faut d’abord les solliciter pour qu’ils essaient eux aussi de convaincre le patient. En cas d’échec, il est bon de leur adresser un courrier pour expliquer clairement la situation ayant conduit à ce refus de soins ».
Si, lors d’une hospitalisation, un patient refuse un traitement et décide de sortir contre l’avis du médecin, là encore, il faut être vigilant. « Il faut faire signer un document de refus de soins et de sortie contre avis médical. Le patient doit y reconnaître qu’il a été informé des risques vitaux auxquels il s’exposait en refusant les soins », indique le Dr Gaultier, en ajoutant que les démarches du médecin doivent être menées dans le cas où le patient est bien sûr en état de comprendre ce qui lui a été dit. « Le cas de patients étrangers ou très perturbés sur un plan psychologique est bien entendu différent. Mais le praticien doit tout faire pour faire intervenir, selon les cas, un interprète ou un psychiatre. Ce qui sera jugé, dans le cadre d’un éventuel contentieux juridique, ce sont les initiatives prises par le médecin pour faire en sorte que le patient ait été informé le plus largement et le plus clairement possible ».
D’après un entretien avec le Dr Cédric Gaultier, cardiologue-conseil au Sou-Médical MACSF et cardiologue interventionnel à l’hôpital Foch (Suresnes) et à l’hôpital européen de la Roseraie (Aubervilliers).
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