LIVRES - Médecine et littérature

Au bonheur d’écrire

Publié le 16/07/2012
Article réservé aux abonnés
1342401240364704_IMG_87723_HR.jpg

1342401240364704_IMG_87723_HR.jpg

1342401241364705_IMG_87724_HR.jpg

1342401241364705_IMG_87724_HR.jpg

1342401239363065_IMG_87722_HR.jpg

1342401239363065_IMG_87722_HR.jpg

1342401241364706_IMG_87725_HR.jpg

1342401241364706_IMG_87725_HR.jpg

* « La Nébuleuse de l’insomnie » (1) est le dernier roman traduit du grand écrivain portugais Antonio Lobo Antunes. Né en 1942 et fils d’un grand neurologue de Lisbonne, Antonio Lobo Antunes s’est spécialisé en psychiatrie et le service militaire accompli pendant la guerre d’Angola, de 1971 à 1973, en tant que médecin a inspiré ses trois premiers romans (« Mémoire d’éléphant », « le Cul de Judas » et « Connaissance de l’enfer »), qui l’ont rendu célèbre dans son pays. Il se consacre exclusivement à l’écriture depuis 1985.

« La Nébuleuse de l’insomnie » raconte la grandeur et le déclin d’un vaste domaine agricole, au siècle dernier, au-delà du Tage. Plusieurs voix entonnent ce chœur d’agonie et notamment celle d’un « autiste », petit-fils du fondateur de la propriété. À l’image de cette fin de règne et pour dire la solitude des êtres, l’écriture est plus que déroutante. Pour traduire le mutisme qui n’est pas seulement le propre de l’autiste, l’auteur nous abreuve d’images et de sensations qui se superposent et s’entrechoquent, il tord le cou à la ponctuation et à la syntaxe à tel point que tout s’embrouille, tout tremble. À chaque lecteur de reconstruire sa grammaire de l’humain.

* Maurice Bigio, nouveau venu dans le sérail littéraire, est né au Caire et vit en France. Il est médecin radiologue mais se consacre désormais à l’écriture. C’est un fervent défenseur des droits de l’homme et un observateur attentif de l’évolution politique, sociale et religieuse du Proche-Orient. Il en a fait le sujet de son premier roman,« l’Iranienne » (2), un récit hautement romanesque évoquant le double combat d’une femme avocate et mère d’un enfant atteint de myopathie. Shirine, juive qui s’est convertie à l’islam par amour, cristallise les tensions entre les communautés religieuses et, au-delà du portrait de cette héroïne solaire, se dessine en creux celui de l’Iran aujourd’hui, dans sa quotidienneté et surtout dans ses paradoxes d’espoir et de liberté.

* Originaire d’Heidelberg, en Allemagne, Nils Trede s’est installé à Paris en 1996 pour y parfaire ses études et exercer la profession de généraliste. Après « la Vie pétrifiée », une histoire hantée par un personnage solitaire et énigmatique, il publie un deuxième roman également sombre, « le Nœud coulant » (3), qui est une sorte d’allégorie de la déchéance des vies repliées sur elles-mêmes. Il a pour cadre North, une ville du bout du monde cernée par les eaux glaciales, où les habitants, ignorants du monde extérieur, sont soudés par une sorte de rite annuel d’une grande atrocité : l’hécatombe des thons qui, chaque printemps, passent dans la baie et sont pris dans un filet géant avant d’être massacrés à mains nues sans autre raison que la tradition. Lorsqu’un étranger arrive dans cette ville où rien ne change et qu’il rencontre la seule femme qui rêve d’ailleurs, la population va user de la même sauvagerie. Puis les choses s’accélèrent...

* Gérard Tobelem mène depuis longtemps une double vie, en tant que médecin, professeur d’hématologie, exerçant diverses responsabilités nationales – il vient de quitter la présidence de l’Établissement français du sang –, et en tant qu’écrivain, avec notamment deux romans, « l’Ami Algérien » et « Dans sa peau ». Il s’appuie aujourd’hui sur ses nombreuses expériences pour parler au nom d’une toute jeune héroïne. La narratrice, 21 ans, est en quatrième année de médecine et la plus brillante de sa promotion, elle est belle, chef d’une bande de copains et depuis peu amoureuse, lorsque le diagnostic tombe : maladie de Hodgkin, moins de 10 % de chances de survie. Le récit se situe à la toute fin des années 1960, dans leur contexte de relative insouciance et leur confiance dans le progrès. Le titre du roman, « Je suis toujours là » (4), indique qu’il s’agit d’un livre d’espoir. Un roman qui interroge autant le patient que le médecin et l’entourage sur son attitude face à la maladie et à celle des autres.

(1) Christian Bourgois éditeur, 347 p., 20 euros.

(2) Calmann-Lévy, 264 p., 17,60 euros.

(3) Les Impressions Nouvelles, 142 p., 14 euros.

(4) Éditions des Rosiers, 232 p., 16 euros.

MARTINE FRENEUIL

Source : Le Quotidien du Médecin: 9153