Réouverture du Lido, sur les Champs-Elysées

Bienvenue au « Cabaret » retrouvé

Par
Publié le 16/12/2022
Adieu au Lido, à bout de souffle et ruiné par le Covid, cédé pour l'euro symbolique au groupe Accor. Place au Lido 2 Paris, sous la direction artistique de Jean-Luc Choplin. Lever de rideau avec « Cabaret », en VO sous-titrée. Robert Carsen rend à la comédie musicale tout son glamour, sans gommer la leçon grinçante de l’Histoire.

Crédit photo : JULIEN BENHAMOU

« Leave your Trouble Outside ! » (Laissez vos soucis dehors !) répète le Maître de cérémonie du KitKat Club berlinois en 1931. Plus que deux petites années pour faire danser les derniers fêtards sur un volcan, dont les signes d’explosion s’accumulent au fil de cette géniale comédie musicale tirée par Joe Masterhoff, John Kander et Fred Ebb du roman « Goodbye to Berlin » de Christopher Isherwood. Les souvenirs d’un jeune écrivain anglais à la sexualité problématique et qui va chercher des solutions dans le Berlin vivant ses derniers feux de liberté avant l’arrivée au pouvoir d’Hitler, ont donné naissance à ce musical, dont Robert Carsen reprend la version originale de 1966, et au film aux huit Oscars de Bob Fosse de 1972.

On laisse dehors ses soucis, avant de se glisser dans ce cabaret reconstitué, qui se prolonge dans la salle aménagée, selon la tradition du Lido, par petits guéridons, où l’on peut boire et manger pendant le spectacle (seul le balcon est installé en rangs de fauteuils), pour mieux s’imprégner de l'atmosphère de l'époque. Ici les formes de fascisme, intolérance et violence résonnent avec celles de l’Amérique des années 1960 de la création du musical mais aussi de notre monde d’aujourd’hui. Tout cela est exacerbé par des projections en fond de scène, dont celle du tableau final avec son panorama de dictateurs modernes et de catastrophes mondiales.

Mais le divertissement est réel ! Tout fonctionne à merveille grâce au magicien Carsen dans ce spectacle sans temps mort, très sexy et parfait dans sa réalisation. Chapeau bas pour le chorégraphe Fabian Aloise, qui a réglé quelques numéros magnifiques (« Wilkommen ! » bien sûr, mais aussi « Money, Money » et « Two Ladies »), pour la troupe limitée mais très efficace, pour les comédiens-chanteurs britanniques, étonnants, et particulièrement Sam Buttery, qui donne au Maître de cérémonie une dimension différente.

Il faut courir voir ce spectacle qui s’installe pour deux mois à Paris et qui prélude à des travaux qui permettront à l’ancien Lido de céder la place à une vraie salle de spectacles. Jean-Luc Choplin, à qui le public de la capitale doit tant de souvenirs, ambitionne d'en faire un Broadway parisien. Il a toute notre confiance ! (Jusqu’au 3 février, places de 29 à 140 €, tél. 01.53.33.45.50, billetterie.lido2paris.com/fr)

 

Olivier Brunel

Source : Le Quotidien du médecin