LES FRÈRES COEN se penchent sur leur passé. Certes, le film n’est pas autobiographique, mais le petit monde qu’ils font revivre est celui de leur enfance dans une communauté juive du Midwest, dans les années 1960. Cela commence par une fable yiddish évoquant le dibbouk, cela continue par l’histoire d’un homme sur lequel pleuvent les catastrophes : « Ce qui nous amusait, explique Ethan, c’était d’inventer de nouvelles façons de (le) torturer. » Larry, tel est son nom, ne comprend pas ce qui lui arrive, ne sait pas comment réagir, demande conseil à des rabbins, et, selon la tradition, n’obtient aucune réponse immédiatement utile.
C’est une comédie. Les yeux écarquillés et l’air le plus souvent ahuri du héros, professeur de physique dans une petite université, plus à l’aise avec le paradoxe de Schrödinger (comment un chat peut être à la fois mort et vivant) qu’avec sa famille, les répliques à contretemps sont censés faire rire, comme « The Barber » était censé faire frémir. Mais ces personnages à côté de leur vie ne sont pas si originaux que le croient leurs marionnettistes.
Même si l’on est familier et friand de cet humour particulier, il n’est pas facile de se passionner pour les déboires de cet homme sérieux – malgré les qualités de son interprète venu du théâtre, Michæl Stuhlbarg –, d’autant que quelques-uns des meilleurs moments ont été largement déflorés par la bande-annonce. Ce n’est pas que les frères Coen manquent de talent, d’intelligence, d’imagination, d’humour et des autres qualités qui font les bons auteurs-cinéastes, leur uvre en atteste depuis « Arizona Junior ». C’est que, peut-être, il manque le décalage, le regard en biais qui faisaient la saveur de leurs autres films. En se penchant sur leur passé, ils ont négligé de serrer les fils d’un vrai récit.
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