Le festival d'Avignon

Des couleurs romanesques

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Publié le 30/06/2016
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Théâtre-Cour d'honneur 1

Théâtre-Cour d'honneur 1
Crédit photo : DR

Il n’y a pas de thématique, à Avignon. Mais la programmation, construite par l’équipe de direction réunie autour d’Olivier Py, fait plus ou moins apparaître des lignes de force. La 70e édition débute le 6 juillet et se poursuit jusqu’au 24. Le « off » est à peu près inscrit dans le même cadre et ne craint pas d’annoncer cet été plus de 1 400 spectacles. Il célèbre lui ses 50 ans !

Côté « in », l’événement est le retour de la Comédie-Française dans la cour d’Honneur, en ouverture du festival. Et avec un spectacle très particulier : une adaptation du scénario des « Damnés », célèbre film de Luchino Visconti, mise en scène par Ivo van Hove, un artiste belge qui a reçu il y a quelques jours les deux plus prestigieux prix de l’association des critiques (meilleur spectacle français pour « Vu du pont », meilleur spectacle étranger pour « Kings of war »). Denis Podalydès, Guillaume Gallienne et leurs camarades reprennent les personnages de la famille d’industriels qui se déchire sur fond de montée du nazisme, en Allemagne, en 1933. Dix représentations (du 6 au 16 juillet), déjà très courues. Le plus simple est de patienter et d’attendre d’être sur place.

Spectacles fleuves

Très courues, elles aussi, les représentations fleuves de l’étrange « 2666 » : cinq dates seulement (du 8 au 16 juillet) pour un spectacle qui demande douze heures de présence à la FabricA. Il s’agit de l’adaptation en cinq mouvements du roman inachevé du Chilien Roberto Bolaño. C’est Julien Gosselin, qui avait secoué le festival, il y a deux ans, avec une adaptation très tonique, drôle et « théâtrale » des « Particules élémentaires », de Michel Houellebecq, qui signe ce travail très ambitieux, qu’il a notamment longuement répété à Valenciennes, au Phénix.

Le foisonnement des thèmes à l’œuvre dans les différents livres qui composent « 2666 »est tel qu’il est impossible d’en résumer l’action. Mais si une question hantait l’écrivain lorsqu’il composa ce livre, se sachant malade et perdu, c’est la question du mal dans le monde avec, notamment, des épisodes très éprouvants situés au Mexique, alors que des femmes sont enlevées, violées, assassinées. Une douzaine d’interprètes, des musiciens, des lumières, beaucoup de vidéo, une manière très moderne d’aborder le théâtre et de nous raconter des histoires.

Autre fleuve romanesque, l’adaptation des « Frères Karamazov », de Fiodor Dostoïevski, par Jean Bellorini. C’est dans le très beau cadre de la carrière de Boulbon que se donnera ce spectacle de cinq heures (du 11 au 22 juillet). Une troupe d’une quinzaine d’interprètes, une part importante de la musique, une manière personnelle de raconter une histoire. Dans ce grand livre, la question du mal est elle aussi clairement posée.

Trois spectacles parmi plus d’une quarantaine de propositions, avec notamment le grand metteur en scène polonais Krystian Lupa, qui présente « Place des héros », de Thomas Bernhard (Vedène, 18-24 juillet) ; avec le Russe Kirill Serebrennikov, qui monte « les Âmes mortes », de Gogol (La FabricA, 20-23 juillet) ; et de fortes personnalités, telle l’Espagnole Angélica Liddell, qui s’interroge elle aussi sur la violence et le mal, dans « Que ferai-je, moi, de cette épée ? » (Cloître des Carmes, 7-13 juillet).

Mais il y a aussi des spectacles plus légers, une palette très large, des lectures, un feuilleton sur l’histoire du festival par Thomas Jolly et ses amis (6-23 juillet, à midi, au Jardin Ceccano), des choix à faire et des artistes à découvrir. Dans le « off », c’est la même chose et pour se frayer une voie dans ce grand marché étourdissant, il vaut mieux naviguer à vue. Une fois sur place !

 

 

 

Tél. 04.90.14.14.14, festival-avignon.com

Armelle Héliot

Source : Le Quotidien du médecin: 9509