* Dramaturge, poète et romancier, Guy Régis Jr partage son temps entre Paris et Port-au-Prince, où il est né. Dans « les Cinq Fois où j’ai vu mon père » (1), il fait ressurgir sa famille autour de la figure d’un absent. Il avait 3 ans la première fois, le temps du jeu des ombres (« Tu fermes les yeux, je disparais »), puis 6 ans, 9 ans, 10 ans, et presque 12 lorsqu’il l’a aperçu alors qu’il embarquait pour fuir le régime politique et la misère. Cinq apparitions plus douloureuses qu’une totale disparition, laissant chaque fois l’enfant avec son questionnement, face aux silences des deux parents, voire aux mensonges de sa mère. Ce livre est le récit de l’absence et du vide, que l’enfant remplit à mesure qu’il grandit par les images, les bruits et les silhouettes de son quotidien, constituant ainsi une photographie personnelle de Haïti.
* Révélée en France avec « le Club des veuves qui aimaient la littérature érotique », la romancière singapourienne Balli Kaur Jaswal revient sur ses thèmes de prédilection : la complexité des relations familiales et la double culture, le tout écrit avec humour. Dans « les Incroyables Aventures des sœurs Shergill » (2), voici en Grande-Bretagne trois sœurs d'origine indienne aux caractères opposés : l’une croule sous ses charges de mère de famille, la deuxième se lasse des contraintes people liées à son statut d’actrice et la cadette s’ennuie dans son mariage arrangé. Pour répondre à la dernière volonté de leur mère, elles entreprennent un voyage en Inde, de Delhi au Temple d’or d’Amritsar avec plusieurs étapes imposées. Un périple mouvementé à la découverte de leurs racines et d’elles-mêmes. Pour le lecteur, un dépaysement aussi agréable qu'instructif.
* Renouer avec ses racines est aussi la démarche du personnage campé par l’Anglaise Jessica Andrews dans son premier roman, « Dans son sillage » (3), qui explore la complexité des relations mère-fille et l’identité de classe. Lucy a grandi dans une cité ouvrière du nord de l’Angleterre entre un père alcoolique, sujet aux fugues, et une mère férocement aimante et influente. Venue à Londres pour ses études, elle a tellement dû ressembler aux autres pour s’intégrer qu’elle s'est perdue elle-même encore plus. Réfugiée dans le cottage irlandais de son grand-père qui vient de mourir, elle remonte le temps pour comprendre. Une réflexion sous forme de courts chapitres sans ordre chronologique apparen, qui forment au final un tableau psychologique et social explicite.
* Stefan Merrill Block est originaire du Texas. Son premier roman et best-seller, « Histoire de l’oubli », racontait, des années 1950 à la fin des années 1990, l’histoire d’une famille frappée de génération en génération par une forme précoce de la maladie d’Alzheimer. « Le Noir entre les étoiles » (4) se situe dans sa région natale. Victime à 17 ans d'une fusillade dans son lycée, Oliver Loving est plongé depuis dix ans dans un coma profond. Un examen ayant révélé des signes d’une activité cérébrale, voici la famille réunie à son chevet. Une famille qui s’est délitée sous le poids de la douleur — la mère refuse que son fils soit débranché, le père a sombré dans l’alcool, le jeune frère s’est enfui à New York —, de la même façon que la ville semble dévastée. Alternant présent et passé et donnant la parole aux différents protagonistes (dont Oliver), sans porter de jugement de valeur (sur l'acharnement thérapeutique ou les armes à feu, par exemple), l’auteur nous amène aux origines et au cœur du drame.
Des secrets dévoilés
* Anne Icart s’est donnée pour vocation d’écrire sur la famille : après « les Lits en diagonale » et les trois romans de la saga Balaguère, elle s’est inspirée de l’histoire des siens pour « Lettres de Washington Square » (5). Cela commence par la découverte, dans une commode de la maison de famille, de plusieurs dizaines de lettres envoyées de New York et adressées au père de l'héroïne, qui n’ont jamais été décachetées. À partir de là se dévoilent soixante ans de la vie d’un père et de son fils séparés par un océan et les humeurs des uns et des autres. L’histoire que ces lettres racontent est toute autre que celle transmise par la légende familiale.
* Le prétexte des « Étincelles » (6) est presque similaire : en rangeant les affaires de son père qui s’est tué trois ans auparavant dans un accident de voiture en Colombie, sa fille, qui le détestait en pensant qu'il rejoignait alors une maîtresse, découvre qu’il a peut-être été assassiné. Commence alors, avec des comparses de caractère, dont son frère, une enquête dans les règles, avec suspense, tension et rebondissements. Plus une dimension écolo-économique. Le nouveau roman de Julien Sandrel, l’auteur de « la Chambre des merveilles », joue ici la famille contre le monde entier !
* Journaliste et chroniqueuse, animatrice sur France Inter durant 13 ans et sur d’autres radios avant son passage à la télévision, Pascale Clarck est aussi écrivaine. « Mute » (7), son quatrième livre, raconte les deux voix qui se sont éteintes en même temps. C’est en effet au moment où elle a cessé de faire de la radio, en juin 2016, que sa mère, atteinte d’une maladie dégénérative qui lui avait fait perdre l’usage de la parole, est décédée. Le livre est le récit d’une vie entière consacrée avec passion à l’info sous le regard bienveillant d’une mère, puis d’une année particulière où les mots ont remplacé les sons.
(1) Gallimard, 195 p., 19 € (2) Belfond, 374 p., 21,90 € (en librairie le 19 mars) (3) Plon, 375 p., 21 € (4) Albin Michel, 448 p., 22,90 € (5) Robert Laffont, 312 p., 19 € (6) Calmann-Lévy, 390 p., 19,50 € (7) Flammarion, 235 p., 19 €
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