CINEMA - « Twixt », de Francis Ford Coppola

Fantômes intimes

Publié le 18/04/2012
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Crédit photo : ZOETROPE CORP

APRÈS d’immenses succès et de cuisants échecs, Francis Ford Coppola, 73 ans, a choisi depuis 2005 – revenant à la réalisation après huit ans après « l’Idéaliste » – la liberté artistique des petits budgets, qui lui permettent de choisir ses sujets et la façon de les traiter. Ainsi naquirent l’intéressant « Tetro », en 2009, et cet étonnant « Twixt », qui peut laisser perplexe. L’idée lui serait venue en rêve : « L’ambiance était inquiétante et éthérée. Alors même que je rêvais, je me suis rendu compte que j’étais dans une histoire de vampires. » Le thème est celui de la perte : le cinéaste évoque directement la mort de son fils, dans un accident de hors-bord, en 1986, et convoque dans son film Edgar Poe (Ben Chaplin), qui ne se remit jamais de la disparition de sa jeune épouse, Virginia, et demeure une référence pour les histoires fantastiques.

« Twixt » (mot ancien qui signifie entre) a pour « héros » un écrivain spécialiste de la sorcellerie et au succès déclinant qui arrive dans une petite ville perdue où vient de se produire un meurtre. L’homme, qui a la silhouette alourdie de Val Kilmer, est en deuil de sa fille adolescente. Il croise en rêve un jeune fantôme nommé V (Elle Fanning) puis Edgar Poe soi-même. Enfants assassinés, vampires, tueur fou, l’intrigue part dans tous les sens sans logique interne.

Il ne faut sans doute pas chercher à comprendre et se contenter de sourire, mais oui, de ces personnages archétypaux du film gothique. Et d’admirer les idées visuelles de Coppola. Il explique avoir presque complètement arrêté les mouvements de caméra : « J’utilise une technique visuelle où la scène s’élabore à partir d’unités de construction filmique en partant du principe que les spectateurs ne s’intéressent pas particulièrement à la mise en scène. » La mise en scène au sens large est pourtant l’intérêt principal de « Twixt », avec les jeux entre le noir et blanc et la couleur, souvent intriqués, les changements d’angle, les basculements d’images. Sans compter les citations mises en abîme. Au-delà des fantômes, les siens, les nôtres, Coppola reste un pourvoyeur de bonheur pour les cinéphiles.

RENÉE CARTON

Source : Le Quotidien du Médecin: 9116