CINEMA - « La Conquête », de Xavier Durringer

Histoire d’un homme

Publié le 20/05/2011
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Crédit photo : E. DE LA HOSSERAYE

NUL NE PEUT ignorer que « la Conquête » évoque la bataille de Nicolas Sarkozy pour se faire élire président. Mais le film, pour évoquer des épisodes précis, et souvent très connus, des quatre années qui ont précédé l’élection, n’est pas un documentaire. Il se revendique comme une fiction et, plus précisément, comme « l’histoire d’un homme qui gagne le pouvoir et perd sa femme ».

Patrick Rotman, contacté par les producteurs Éric et Nicolas Altmayer qui avaient vu son film sur Chirac, a dépouillé toute la presse de 2002 à 2007, lu une soixantaine de livres et rencontré de nombreux protagonistes et témoins. C’est dire si ce premier film sur un président en exercice est documenté. Xavier Durringer, homme de théâtre et cinéaste (« J’irai au paradis car l’enfer est ici ») a été stimulé par le défi : « Plus on me disait de ne pas toucher à ce sujet, plus l’excitation et la passion m’emportaient. » Lui s’est plongé dans quelque 10 000 photos de Sarkozy prises entre 2002 et 2007. Tandis que Denis Podalydès a travaillé en premier lieu la voix.

Alors au début, c’est vrai, on admire les ressemblances, comme on applaudit les imitateurs. Sarkozy, Chirac, Villepin, Cecilia, Guéant et les autres conseillers sont bien campés et des scènes vues jusqu’à plus soif dans les médias sont reconstituées avec habileté. Mais, heureusement, le film n’est pas que cela. Durringer parle de scénario shakespearien, évoque le film noir ou le western à propos de l’affrontement Sarkozy-Villepin. Et l’on finit par oublier qu’on nous raconte une histoire archiconnue. Même s’il n’y a pas de suspense, on se demande ce qui va suivre. Parce que l’individu qui est mis en scène, tel qu’il est montré, est un personnage intéressant et que le drame qu’il vit, être abandonné par la femme qu’il aime au moment même où il atteint le but qu’ils ont poursuivi tous deux pendant des années, est un bon sujet de cinéma - à défaut d’être original.

Ce miracle doit bien sûr beaucoup à Denis Podalydès, un acteur qui peut tout faire et qui sait à propos dépasser les limites. Bernard Le Coq est un Chirac attendu et Samuel Labarthe un Villepin déchaîné et il faudrait aussi citer tous les autres, Florence Pernel, Hippolyte Girardot, Mathias Mlekuz, Grégory Fitoussi... Et ne pas oublier la musique de Nicola Piovani, qui donne un ton guilleret à cette comédie du pouvoir qui est aussi un drame.

Le film fera-t-il aimer ou détester davantage Nicolas Sarkozy, le président ? On laisse la question aux analystes politiques.

R. C.

Source : Le Quotidien du Médecin: 8967