Tout commence par une photo de baptême. Elle est prise en été 1947. On y voit une maman, très jeune, porter dans ses bras un bébé. Il regarde l’objectif, décidé. À gauche, un homme que l’on ne peut pas confondre : le Général de Gaulle ! Un ami de la famille.
Un clin d’œil malicieux. Jean-Michel Ribes n’a jamais détesté voir de près le pouvoir politique. Mais s’il s’est plutôt bien entendu avec François Hollande, il avait pris plaisir à moquer Nicolas Sarkozy dans un spectacle qui ne convainquit pas les foules, « René l’Énervé », défini comme « opéra-bouffe et tumultueux ». Rien qui puisse rompre les liens cordiaux du directeur du Théâtre du Rond-Point.
Écrit par Fabienne Pascaud, critique dramatique et directrice de la rédaction de « Télérama », bénéficiant d’une iconographie remarquable, avec de nombreux documents inédits, le livre est une somme. Histoire d’un artiste, mais histoire extraordinairement fertile de ses créations, parmi les plus toniques du paysage français, de 1966 à nos jours.
Né dans une famille cossue où se côtoient aristocrates et bourgeois très cultivés, le jeune Ribes est expédié par son père dans un collège tenu par des Jésuites. Il y rencontrera un ami pour la vie : Gérard Garouste. C’est avec lui que Jean-Michel Ribes va fonder sa première compagnie.
Au Pallium, il y a Garouste et sa femme Elisabeth, et d’autres amis pour toujours, Philippe Khorsand et un jeune étudiant en philo un peu barbu, Michel Leeb. Ils montent Pirandello, Mirbeau, Ben Jonson, Arrabal, et les premiers textes de Ribes lui-même. Dont « les Fraises musclées », qui feront un grand effet en 1970. Il a sa bande. Une bande où se glisse notamment la belle Andréa Ferréol.
Rire de résistance
Les titres sont tout un programme : « Il faut que le sycomore coule », puis « Je suis un steak » avec Gérard Darmon, ou encore « Par-delà les marronniers », qu’il reprendra des années plus tard, en 2016. Il y évoque le destin de trois écrivains météores : Arthur Cravan, Jacques Vaché, Jacques Rigaut. Il aime aussi Gérard de Nerval et écrit « On loge la nuit-Café à l’eau », évocation jouée par Judith Magre, et des dizaines d’autres textes, dont certains le conduisent jusqu’à Avignon.
On croise dans ces années-là, galvanisés par l’imagination débordante de Jean-Michel Ribes, qui a rencontré son frère en poésie et insolite, Roland Topor, les meilleurs comédiens, les personnalités fortes, de tous âges, tous horizons. De Jacqueline Maillan à Agnès Jaoui, Roland Blanche et Michel Berto. Il signe des mises en scène à la Comédie-Française. Il est un auteur et un metteur en scène qui compte, et se lance aussi du côté de la télévision, avec l’inoubliable « Palace ».
À l’orée des années 2000, il est naturellement choisi pour faire du Rond-Point le foyer le plus ardent consacré aux auteurs contemporains. Chacun connaît mieux cette partie de la carrière de Jean-Michel Ribes. Mais envisager l’ensemble est impressionnant. Rire, il aime le rire et sait qu’il n’y a pas de meilleure arme de résistance. En 1971, le jeune comédien avait joué un aumônier parachutiste dans « Avoir vingt ans dans les Aurès ». Il a toujours été au plus près de son temps. Et découvrir en images et textes son chemin, est aussi une façon de revoir un peu l’histoire de France.
Actes Sud (2019), 352 p., 49 €
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