Dans « Une joie féroce » (1), le journaliste (à « Libération » longtemps, au « Canard Enchaîné » aujourd'hui) et auteur multiprimé Sorj Chalandon (« Une promesse », prix Médicis 2006, « Retour à Killybegs », Grand Prix du roman de l’Académie française 2011, « le Quatrième Mur », prix Goncourt des lycéens 2013), a construit une histoire rocambolesque pour parler d'un sujet complexe et sensible : les femmes et le cancer. Jeanne, la narratrice, une libraire qui frôle la quarantaine et dont le couple vacille depuis la mort de leur enfant deux ans auparavant, apprend qu’elle a un cancer du sein. Son mari ne supporte pas l’idée qu’elle va perdre ses cheveux et l'abandonne à ses questionnements et ses souffrances. Lors de sa première séance de chimio, elle rencontre Brigitte, puis Assia et Melody, trois femmes également blessées par la vie, qui se reconnaissent dans le combat contre la maladie et pour retrouver la force et la joie de vivre. Ensemble, pour aider l’une d’elles, elles préparent un improbable braquage. Le roman, qui était centré sur les épreuves physiques et psychologiques de la maladie, décrites de façon aussi détaillée que sensible, et sur la montée en force de l’amitié et de la solidarité, vire à l’action. Malheureusement peu crédible.
Le chirurgien et le cerf
Auteur d’une douzaine de livres (dont « Mille Six Cents Ventres », Prix Goncourt des Lycéens, et dernièrement « Au commencement du septième jour »), Luc Lang raconte, dans « la Tentation » (2), le basculement vers un monde nouveau, à travers le sentiment de déclin d’un père face à ses enfants devenus des jeunes adultes. Le livre est violent, évidemment. Il s’ouvre sur la traque d’un cerf dans les Alpes enneigées. Au moment de tirer, François hésite, il le blesse et, au lieu de l’achever, l’emmène dans son chalet pour le réparer. Pourquoi ce chirurgien lyonnais féru de chasse a-t-il utilisé sa puissance non pour tuer mais pour sauver l’animal ? Marié à une femme sujette à des crises mystiques, il voit rarement son fils, qui a abandonné ses études de médecine pour s’enrichir comme trader à New York, et n’a plus de nouvelles de sa fille. Mathieu est justement de passage ce jour-là et Mathilde sonne à la porte, car elle a besoin d’aide. Luc Lang, qui excelle dans les scènes de chasse comme d’opération chirurgicale, nous parle donc d’un père dans la cinquantaine, au faîte de sa vie professionnelle mais au bord du gouffre, car il sait qu’avec lui disparaîtront les biens et les valeurs – le relais de chasse, l’amour de la médecine – qui ont fait sa vie, au profit de valeurs actuelles – l’argent, l’apparence – qui lui sont étrangères.
Chez Charcot, à la Salpêtrière
De la romancière allemande Christine Wunnicke, on ne connaît en France que « Katie », roman dans lequel, en s’appuyant sur des personnages qui ont vraiment existé, dont le physicien William Crookes, elle fait revivre l’esprit du mesmérisme qui soufflait sur Londres à la fin du XIXe. Dans « le Renard et le Dr Shimamura » (3), elle s’intéresse, à partir du cas d’une très belle jeune fille, au mal ancestral japonais de possession du renard (un renard semblant se lover et glisser sous la peau de sa victime). Alors jeune médecin et ébranlé par cette expérience, le Dr Shimamura est allé à Paris pour étudier auprès du Pr Charcot et de ses assistants, Tourette, Babinski et Binet, et tenter de connecter sa propre culture à celle de la médecine française. Tout en continuant d’explorer les frontières ténues entre imaginaire et réalité, l’auteure nous ramène dans les amphithéâtres bondés de la Salpêtrière de l’époque, tout en nous faisant pénétrer dans les arcanes de la culture nippone, de la fin du XIXe aux années 1920.
Après un passage dans le cinéma, Victoria Mas (fille de la chanteuse Jeanne Mas) s’est emparée d’un sujet aussi réel que provoquant, le fameux « Bal des folles » (4), l’une des expérimentations de Jean-Martin Charcot pour faire des internées de l’Hospice de la Salpêtrière des femmes comme les autres. Le temps d’une soirée, à la Mi-Carême, les idiotes, épileptiques, hystériques, maniaques et les autres côtoyaient le Tout-Paris mondain et scientifique. Ce sont ces « autres » qui intéressent l’auteure, qui n’avaient rien de « folles » mais avaient été rejetées par leur famille et enfermées parce qu’elles ne se pliaient pas à l’ordre social et patriarcal de leur temps. Victoria Mas retrace, de manière vive et dialoguée, le parcours de quelques adolescentes et femmes à la veille du bal du 18 mars 1885, qui a changé le destin de quelques-unes.
Maladie de famille
Femme de cinéma reconnue, Nathalie Rheims est aussi une écrivaine qui puise sa matière dans sa vie personnelle. Son vingtième roman, « les Reins et les cœurs » (5), témoigne de la maladie génétique qui, génération après génération, a détruit les reins des femmes de sa famille. À 58 ans, et après des années de déni, bien qu’elle ait vu sa mère en dialyse pendant vingt-cinq ans et que sa sœur, la photographe Bettina Rheims, l’ait toujours incité à surveiller comme elle les signes de la maladie, elle se retrouve en réanimation. Puis en dialyse trois jours par semaine durant quatre heures, avant qu’elle accepte le don d’un rein d’un « ange salvateur ». Un récit sobre de souffrance et d'espoir.
(1) Grasset, 312 p., 20,90 € (2) Stock, 354 p., 20 € (3) Jacqueline Chambon, 168 p., 21,50 € (4) Albin Michel, 251 p., 18,90 € (5) Léo Scheer, 205 p., 18 €
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