« C’EST CE QUI VA DE SOI qu’il faut principalement interroger », disait Maurice Merleau-Ponty. Et rien ne semble plus acquis et évident que les bienfaits de la croissance. N’assure-t-elle pas depuis longtemps notre confort ? L’augmentation de nos revenus ? N’est-elle pas porteuse de paix sociale et de démocratie ? dépasser. Pour Dominique Méda, ces arguments constituent non une démonstration, mais une « mystique ». Cette titulaire de la chaire « Reconversion écologique, travail, emploi, politique sociale » au Collège d’études mondiales pointe le fait qu’on a totalement négligé, dans la célébration de ce mythe, les nombreux bouleversements provoqués par la croissance exponentielle, sur notre milieu en particulier, sans compter, sur le simple plan financier, l’impossibilité de combler une dette qui se creuse de plus en plus.
Bien entendu, de nombreuses analyses mettent en évidence les conséquences néfastes, aujourd’hui plus ou moins reconnues, entraînées par la croissance à tout prix. Le réchauffement climatique, imputable aux activités humaines. La disparition des ressources naturelles fossiles (pétrole, charbon) et des minerais (cuivre, étain, zinc, argent). La pollution générée par notre mode de vie. Ajoutons-y la destruction de notre santé par voie de conséquence, la dégradation des écosystèmes et de la biodiversité.
Au-delà des besoins.
Le plaidoyer pour préserver un patrimoine naturel intouchable, lié en particulier à l’air, l’eau, le climat, est le fer de lance du combat que constitue ce livre. Ceci inclut un retour vers l’histoire même de la formation de cette « mystique ». Sous la croissance il y a la production, et sous la production le travail. Dominique Méda montre combien la production a pu être positive. Elle a permis en particulier de faire « tenir ensemble des individus qui ont inventé des règles rendant l’ordre social aussi solide que l’ordre naturel antérieur ». Elle est devenue le « cœur de la fabrique du lien social ». Mais la machine s’est emballée, nous n’avons pas su canaliser sa puissance. Il a fallu augmenter la production de manière illimitée, très au-delà de nos besoins, au point qu’elle s’est retournée contre nous.
Utilisant habilement les travaux de Tim Jackson ou Jeremy Rifkin (« la Troisième Révolution industrielle », 2012), l’auteur montre que si la prospérité fut utile et épanouissante, elle a fini par se confondre avec le montant du PIB. Or, la satisfaction s’est peu à peu déconnectée du montant de ce PIB, comme l’indiquent les enquêtes en Occident.
Cet essai, qui ne plaide pas pour autant en faveur de la « décroissance » si à la mode, pointe le ridicule qu’il y a à espérer que tous nos maux seront supprimés par le « retour » d’une croissance qui en est la cause. Mais une conscience aiguë de tout ceci est née depuis un certain temps (au travers de la pensée du prix Nobel d’économie Amartya Sen, entre autres), de sorte que nous ne sommes pas sûrs de la pertinence du terme « mystique ».
Dominique Méda, « La Mystique de la croissance - Comment s’en libérer », 255 p., 17 euros.
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