L’AUTEUR, constatant la quasi-disparition des livres traitant de cette notion, ne se laisse nullement décourager. « La patrie, écrivait l’historien Fustel de Coulanges, c’est ce qu’on aime. » N’est-ce pas terriblement positif ? Cela permet de la distinguer de la nation, qui est ce sur quoi on se crispe, à l’exclusion des autres nations. En théorie, l’Histoire a condamné le nationalisme, même si on continue de l’encourager sous la forme du chauvinisme, dans le football, par exemple.
Mais sur quoi précisément porte cet amour ? Sur trois domaines fondamentaux, répond Michel Lacroix : un territoire, des coutumes, manières de vivre, enfin une langue, élément clef de ce sentiment.
On lira avec intérêt ce que ces trois piliers entraînent comme développements chez l’auteur, qui, au-delà du simple amour (c’est déjà beaucoup…), s’ancre dans la féconde idée d’« appartenance ». On fait partie de cette idée de patrie, comme l’Être spinoziste est une partie de Dieu.
Or, montre le philosophe, il y a deux manières de situer ce sentiment d’appartenance. Je peux me sentir comme enserré par un fort déterminisme qui m’écrase. C’est sans doute ainsi qu’un citoyen se sentait relié au Roi, naguère. Déterminisme et paradoxalement aussi hasard. « La patrie, disait Maurras, est une société naturelle (...) son caractère décisif est la naissance. »
Du particulier à l’universel.
Mais, insiste fortement Michel Lacroix, mon pays peut aussi être l’objet d’une adhésion, d’un libre consentement que je lui donne. On passe alors, on le sent, du côté des théories du contrat, par où, quittant l’étriqué déterminisme du particulier, je m’envole vers un volontarisme universel. Ceci mérite un détour par l’Histoire des peuples et des idées, qui est en fait le cœur de l’ouvrage.
Les écrivains du siècle des Lumières constituent, selon l’auteur, le paradigme qui réunit la curiosité pour les particularismes des peuples et, en même temps, l’exigence universaliste. On pense au vieux Kant, si inclus dans son Königsberg natal, dont la pensée exige l’Universalité. On pense au Bergson des « Deux Sources de la morale et de la religion », qui nous ouvre progressivement de l’amour des proches à celui de toute l’Humanité.
Pointant deux dangers contraires dans l’époque actuelle, l’enlisement régionaliste, voire communautariste, et le mondialisme qui dissout la spécificité des nations, Michel Lacroix assigne à la France la vocation de transmettre un nouvel Universel des patries. Elle est un havre de bonheur privé, un jardin, mais en son centre se dresse un rayonnement panoptique, un phare.
Nouvel appel au héros ? Peuple élu ? Ce livre sensible et bien mené risque d’en agacer certains, ces « frenchies », hum, « very arrogant ». Il peut aussi amuser le vieil anar prompt à siffloter « les imbéciles heureux qui sont nés quelque part ».
« Éloge du patriotisme - Petite philosophie du sentiment national », Robert Laffont, 137 p., 17 euros.
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