Le monologue d'un jeune médecin

Difficile d’être « fils de ». Pas plus simple d’être « petit fils de », même si les jeunes d’aujourd’hui ne connaissent pas le « vrai » nom de Jean Gabin. Alexis Moncorgé est donc son petit-fils. On ne le connaissait pas et la manière dont il incarne le narrateur d’« Amok », nouvelle de Stefan Zweig qu’il a adaptée et joue, mis en scène par Caroline Darnay, l’impose comme un jeune comédien avec qui il faudra compter.

Dans la petite salle du Théâtre de Poche-Montparnasse, avec ses banquettes rouges et son environnement noir, on est dans une grande proximité avec le narrateur. Le spectacle, c’est la nouvelle déployée et jouée. Une scénographie légère de Caroline Mexme, un travail sur le son, les lumières, tout est précis et maîtrisé.

Il faut écouter et l’émotion vous submerge. On est en mars 1912, sur le pont d’un bateau, la nuit. Entre la Malaisie et l’Europe. Celui qui parle est un jeune médecin. Il s’en va. Il fuit. Il cherche à se sauver et il faut l’entendre dans les deux sens. Il exerçait au cœur de la jungle. Et un jour surgit une femme. Une femme fatale venue de la ville. « Amok » désigne, dans cet Extrême-Orient d’un autre temps, la crise meurtrière qui s’empare de certains des opiomanes. « Amok », pour Zweig, c’est un être qui est « possédé ». Possédé par des pulsions internes, des pulsions qui le déchirent et le détruisent.

Il faut suivre ce récit. Écouter ce jeune homme, ce jeune interprète très fin et sensible, à la présence forte et douce à la fois. C’est un spectacle sobre, très probe, très émouvant. Un moment de pure émotion et une écriture puissante et prenante. On regrettera qu’aucun nom de traducteur ne soit précisé. Mais cela n’empêche pas de passer un moment vif et touchant.

Poche-Montparnasse, du mardi au samedi à 19 heures et le dimanche à 17 h 30. Durée : 1 h 15. Tél. 01.45.44.50.21, www.theatredepoche-montparnasse.com.