* Né à Ankara, grandi dans un internat de la Suisse romande, ingénieur en physique et en génie atomique, Metin Arditi a signé une quinzaine de romans, dont « le Turquetto », « l’Enfant qui mesurait le monde » ou « Carnaval noir ». Dans « Rachel et les siens » (1), il brosse le grandiose portrait d’une femme dans ses mérites et ses faiblesses et évoque à travers elle l’inextricable problème de la Palestine.
L’histoire de cette femme qui aimait tant raconter des histoires qu’elle est devenue une dramaturge célèbre commence en 1917 à Jaffa, où, avec ses parents, des juifs de Palestine, elle partageait avec bonheur une maison avec une famille d’Arabes chrétiens. L’Histoire a détruit cette harmonie. L’auteur fait partager les destins croisés de Rachel et de ses proches d’Istanbul à Genève en passant par Tel-Aviv et Paris, sa vie d’artiste mouvementée, ses amitiés partagées, ses amours nombreuses et pas toujours heureuses, ses difficultés d’être une mère sur fond de domination turque puis de montée des extrémismes, guerres et exils, sans compter les déchirements plus intimes de secrets de famille. Un roman riche en rebondissements humains, plus convaincant qu’un exposé d’idées politiques.
* Après 36 années passées dans l’armée et autant de romans publiés, dont « l'Écrivain », où il révélait sa véritable identité sous le pseudonyme de Yasmina Khadra, « l’Attentat », « les Hirondelles de Kaboul » ou « Ce que le jour doit à la nuit », l’auteur algérien explore une année charnière entre la fin de la colonisation et le début de l’indépendance. Dans « le Sel de tous les oublis » (2), Adem, quitté par sa femme pour un autre homme, abandonne son poste d’instituteur et s’en va à travers les hauts plateaux de Blida. Amer et désespéré, il rencontre dans son errance des personnages hors du commun, emblématiques de cette époque et de ces villages reculés, abîmés dans leur tête et leur corps par la guerre et le poids des traditions et des croyances religieuses, notamment en ce qui concerne la place des femmes, mais riches de rêves et de grandeur d’âme. La réflexion d’un conteur aguerri sur la difficulté de l’Algérie à rompre avec son passé.
Victimes
* Elizabeth Wetmore est née dans l’ouest du Texas et parle de ce qu’elle connaît. « Glory » (3) se situe en 1976 dans cette partie des États-Unis, à Odessa. Gloria, 14 ans, a été violée, battue et laissée pour morte. Le sujet du livre n’est pas tant la souffrance de la victime, l’enquête ou le procès, que le regard d’une communauté bigote et raciste sur l’événement. Le roman choral donne la parole à plusieurs femmes sans beaucoup d’éducation ni d’argent, habituées à survivre parmi des hommes misogynes et racistes. Une voix s’élèvera courageusement pour affirmer que ce drame qui met en cause un jeune Blanc bien sous tous rapports n’est pas un incident bénin pour une Latina évidemment précoce et qui l’avait cherché. Sera-t-elle entendue ?
* Dans un État du Sud de l’Inde, deux adolescentes s’aimaient d’amitié pure. L'une était sur le point d’être mariée quand l’autre a été violentée et s’est enfuie ; son amie l’a recherchée jusqu’aux États-Unis et c’est dans la pègre indienne de Seattle qu’elles affronteront ensemble l’esclavage sexuel, les mutilations, la captivité. Salué par la presse américaine, « J’irai te chercher jusqu’au bout du monde » (4) est signé Shobha Rao, qui a quitté l’Inde à l’âge de 7 ans et a été pendant plusieurs années avocate pour les victimes de violences conjugales. À travers cette ode à l’amitié rédemptrice, elle entend montrer que les femmes indiennes ne sont pas les seules à subir la tyrannie du patriarcat et l’esclavage sexuel, que cela n’existe pas seulement au sein de la diaspora mais que toutes les femmes, partout, le subissent.
* Dédié aux victimes des féminicides et écrit par une « enseignante, féministe, militante socialiste, mère de sept enfants », « Mangeterre » (5), premier roman de Dolores Reyes, est devenu un best-seller dans son pays, l’Argentine. Sorte de conte contemporain porté par un réalisme magique, il met en scène une jeune fille qui, en mangeant la terre que des personnes disparues (des femmes le plus souvent) ont foulée, peut dire ce qui leur est arrivé. Celle que l’on surnomme Mangeterre plie sous le poids des tragédies qu’elle affronte, la souffrance des proches, les transes répétées et finalement son impuissance à endiguer le flot des violences. Narratrice de sa propre histoire, elle est aussi celle qui transcende la douleur de toutes les femmes.
* Retour dans le passé avec la collection « Vintage », qui réédite « l’Invitation à la valse » (6) et sa suite « Intempéries » (7), deux livres de Rosamond Lehmann (1901-1990), grande figure de la littérature anglaise et référence féministe. C’est l’occasion de revivre les émois d’une jeune fille sur le point d'entrer dans l’âge adulte et qui vit son premier bal chez lord et lady Spencer ; puis, de la retrouver dix ans plus tard, en 1930, divorcée, retrouvant par hasard son premier amour.
(1) Grasset, 512 p., 24 € (2) Julliard, 255 p., 19 € (3) Les Escales, 314 p., 21,90 € (4) XO Éditions, 350 p., 19,90 € (5) L'Observatoire, 207 p., 20 € (6 et 7) Belfond, 235 & 519 p., 14 € chacun
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