Yannick Haenel, Patrice Leconte, Claire Barré, Marcel Pagnol

Littérature et cinéma, même combat

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Publié le 20/11/2017
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L-Tiens ferme ta couronne

L-Tiens ferme ta couronne

L-Pourquoi je n'ai pas

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L-Dictionnaire Leconte

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L-Pagnol

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L-Tiens ferme ta couronne

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L-Pourquoi je n'ai pas

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L-Dictionnaire Leconte

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L-Pagnol

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Finaliste du Goncourt et du Grand Prix du Roman de l’Académie française (raté à 1 voix près), Yannick Haenel a été reconnu par le Médicis. En récompensant son 7roman, les jurés ont dans la foulée salué la mémoire de deux des leurs disparues cette année, la romancière et scénariste Emmanuèle Bernheim et la romancière et comédienne Anne Wiazemsky.

« J’ai deux passions dans la vie : le cinéma, notamment le cinéma américain, et la littérature. J’ai essayé avec ce livre d’assouvir ma cinéphilie avec des phrases », a expliqué le lauréat à propos de son roman, « Tiens ferme ta couronne » (1), qui, sous l’apparence d’aventures rocambolesques, est un livre d’initiation confinant au spirituel.

Le narrateur, Jean Deichel, double de l’écrivain et personnage de plusieurs de ses romans (dont « Cercle », prix Décembre et prix Roger Nimier en 2007), est une sorte de perdant magnifique, alcoolique à la dérive obnubilé par deux autres « losers ». Après avoir tenté en vain de placer un scénario de 700 pages consacré à l'auteur de « Moby Dick », il se met en tête de l'offrir au réalisateur de « Voyage au bout de l’enfer » et de « la Porte du paradis ». Le voici en route vers New York, pour un voyage, des rencontres et des aventures improbables et délirantes, qui, en se déployant, ouvrent sur tous les arts et toutes les formes de beauté.

À 50 ans, le fondateur de la revue littéraire « Ligne de risque » et auteur de « Jan Karski » (prix Interallié 2009), montre le chemin, entre tribulations et divagations, pour trouver, reconquérir ou s'accrocher à cette couronne qui fait de chacun un être unique.

Scénarios et correspondances

Littérature et cinéma, également, avec « le Dictionnaire de ma vie » (2), dans lequel un homme aussi célèbre que discret, Patrice Leconte, se livre au jeu de la confession à partir de 26 mots, de A comme « Acteurs » à Z comme « Zoom ». On y découvre les coulisses de ses comédies depuis « les Vécés étaient fermés de l’intérieur » en 1976 (« les Bronzés 1 et 2 », « Viens chez moi j’habite chez une copine », « Ma femme s’appelle revient », « Circulez y a rien à voir »...), et de ses films d’« auteur » (« Monsieur Hire », « le Mari de la coiffeuse », « Ridicule », « la Fille sur le pont »...). Et on y côtoie les plus grands noms du cinéma français depuis un demi-siècle. On découvre aussi le metteur en scène de théâtre, l'auteur de BD et l'écrivain. Patrice Leconte a signé 4 romans, dont le récent « Louis et l’Ubiq » (Arthaud), qui porte sa griffe de fantaisie et de poésie.

Claire Barré est scénariste et l’auteure de trois romans (« Ceci est mon sexe », « Baudelaire, le diable et moi » et « Phrères »). Après que l’image d’un chef indien lui est apparue un jour dans sa cuisine, elle a entrepris un double voyage, réel et spirituel, qu’elle raconte dans « Pourquoi je n’ai pas écrit de film sur Sitting Bull » (3). Internet lui ayant permis d’apprendre qu’il s’agissait du chef de tribu et médecin des Lakotas Hunkpapas, elle est d’abord allée chez une chamane russe à Paris afin de décrypter le sens de cette vision. Puis elle s’est rendue dans le Dakota du Sud pour rencontrer Ernie LaPointe, l’arrière-petit-fils de Sitting Bull, bien décidée à faire un film sur le vainqueur de Little Bighorn (25 juin 1876).

Au-delà de son périple en terre sioux, qui montre la réalité des réserves indiennes et ce qu’il reste de cette culture, Claire Barré témoigne de sa découverte du chamanisme et des insoupçonnables voyages de notre esprit comme des imprévisibles sources d’inspiration de la création littéraire.

On ne saurait passer sous silence les « correspondances intimes et littéraires » de Marcel Pagnol, pour la première fois révélées, sous la houlette de son petit-fils Nicolas Pagnol et de Thierry Deshayes, qui lui a déjà consacré deux essais. Les lettres de « Je te souhaite beaucoup d’ennemis comme moi » (4) montrent les relations intimes que Marcel entretenait avec son frère, le petit Paul, son père Joseph, son épouse Jacqueline et son fils Frédéric. Elles révèlent également ce qu’il partageait avec ses pairs écrivains, dont Jean Ballard, avec qui il lança la revue « Fortunio », Jean Giono, dont les romans lui inspirèrent les films « Angèle », « Regain », « la Femme du boulanger », et aussi Georges Simenon et Albert Cohen, Pierre Benoit, Kessel ou Maurice Druon.

 

 

 

(1) Gallimard 352 p., 20 €
(2) Kero, 223 p., 17 €
(3) Robert Laffont, 244 p., 18 €
(4) Robert Laffont, 359 p., 24 €

Martine Freneuil

Source : Le Quotidien du médecin: 9620